Coût de l’électricité nucléaire : vers un tarif en (forte) hausse

Dans un contexte d’inflation des prix de l’énergie qui complique toujours plus le quotidien des Français, voilà une nouvelle peu réjouissante. Le 19 septembre 2023, des chiffres d’un rapport confidentiel réalisé par la Commission de régulation de l’énergie ont été publiés. Ceux-ci concernent l’évolution du coût de la production d’électricité nucléaire pour l’horizon 2026, une fois la disparition du dispositif de l’Arenh définitivement actée. Le constat est sans appel : nous nous dirigeons vers une réelle hausse du prix au mégawattheure, qui serait compris, d’après les évaluations, entre 57 et 61 euros. C’est sans compter les propres estimations d’EDF qui ont donné naissance à des chiffres encore plus élevés. Quel serait exactement le coût du nucléaire à compter de 2026 ? Que peut-on exactement conclure de ces chiffres en hausse ? Les consommateurs doivent-ils craindre une nouvelle (et énième) flambée de leur facture d’électricité ? Choisir.com fait le point.

cout nucleaire en hausse

Un coût de production nucléaire qui passerait de 48 € à 61 € en 2026 ?

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a dernièrement réalisé de nouvelles estimations vis-à-vis du coût de production du parc nucléaire pour les vingt prochaines années.

À l’origine de cette nouvelle estimation : le gouvernement. Dans un courrier datant du 10 mars dernier, l’exécutif avait demandé à la CRE de :

  • mettre à jour son évaluation du parc de production nucléaire existant ;
  • d’y inclure l’EPR de Flamanville (Manche) qui doit être connecté au réseau lors du premier trimestre 2024.

Toutefois, les chiffres estimés n’auraient jamais dû être publiés, ou tout du moins pas si tôt. Le rapport de la CRE, remis au gouvernement en juillet 2023, avait pour but de demeurer confidentiel. Cela n’a pas empêché certains éléments de fuiter pour former une synthèse publiée chez le média en ligne Contexte, le 19 septembre dernier. Il s’agit d’un site d’information spécialisé dans les politiques publiques et qui est très bien informé en matière d’énergie.

Ce rapport a ensuite été officialisé par le gouvernement. Ce qu’il en ressort immédiatement, c’est qu’en trois ans seulement, le coût de production de l’électricité nucléaire bondirait de manière sensible. En 2020, il avait été estimé par la CRE à 48,36 € par mégawattheure (MWh). Pour 2026 et après, il serait compris entre 57 € et 61 €.

Concrètement, la progression de ce coût se fixerait à :

  • 60,70 € par MWh sur la période 2026-2030 ;
  • 59,10 € par MWh sur 2031-2035 ;
  • 57,30 € par MWh sur 2036-2040.

Les variations de tarif entre les différentes périodes s’expliquent par le rythme d’entrée en service des futurs EPR2, les réacteurs nucléaires nouvelle génération. Car l’énergie nucléaire reste bien le type de production décarbonée qui est la priorité du gouvernement français. En témoigne cette décision récente de construire dans l’Hexagone six EPR2 supplémentaires. Au niveau européen, le gouvernement a même obtenu un compromis pour que cette forme d’énergie soit incluse dans la nouvelle directive RED III sur les énergies renouvelables.

À noter, par contre, que l’estimation de la CRE n’intègre pas le financement de ce nouveau programme nucléaire français, né de la volonté présidentielle.

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En prévision de la suppression de l’Arenh, une autre estimation réalisée par EDF… avec des hausses encore plus importantes

Un autre rapport prospectif a été, en même temps, réalisé par EDF et présenté à la CRE comme au gouvernement. Son bilan fait état d’une augmentation à venir des coûts de production d’électricité nucléaire qui serait encore plus élevée. D’après EDF, ceux-ci devraient grimper à :

  • 74,80 € par MWh sur la période 2026-2030 ;
  • 73,90 € par MWh sur 2031-2035 ;
  • 69,90 € par MWh sur 2036-2040.

La différence entre les chiffres de la CRE et d’EDF est réellement saisissante. Comment l’expliquer ? Le but de ces estimations est en réalité de trouver un consensus autour d’un nouveau tarif régulé de l’électricité nucléaire. Depuis 2010, l’Arenh (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique) est en place en France. Ce dispositif, auquel EDF a souvent montré son opposition, va cesser d’exister fin 2025. Il obligeait le producteur et fournisseur historique à vendre, chaque année :

  • 100 térawattheures (TWh) d’électricité à 87 fournisseurs alternatifs concurrents ;
  • à un prix bas bloqué et inchangé depuis 2012, fixé à 42 € le MWh.

Cette obligation représentait pour EDF un gros manque à gagner. Ça a surtout été le cas lors de l’année noire de 2022 marquée par l’immobilisation prolongée d’une grosse part de ses réacteurs nucléaires. Ces importantes difficultés et ces pertes records l’ont même obligé, en avril 2023, à geler ses embauches.

L’énergéticien travaille donc actuellement avec le gouvernement dans le but d’élaborer un nouveau cadre de régulation qui prendra la suite de l’Arenh dès 2026. Le ministère de la Transition énergétique a effectivement indiqué que ces nouvelles analyses se placent « dans le cadre des travaux relatifs à une nouvelle régulation du marché de l’électricité ». Avec quel objectif ? Que « les consommateurs français, ménages et entreprises, puissent bénéficier de prix stables, proches des coûts de production d’électricité en France ». C’était là la promesse du président Macron lors de son discours de Belfort de février 2022 sur la relance du nucléaire.

Toutefois, le but d’EDF est aussi que ces nouveaux chiffres permettent de lui offrir une plus juste rémunération. Est-ce cette volonté qui explique l’écart entre ses estimations et celles de la CRE ? Pour le « gendarme de l’énergie » français, EDF aurait tendance, dans les chiffres fournis, à gonfler ses coûts et à multiplier les raisons de surenchérir. Sollicitée, la direction du groupe énergétique n’a pas souhaité apporter de commentaires vis-à-vis de son rapport ou de l’analyse faite par la CRE.

Une hausse des factures d’électricité des consommateurs à craindre ?

Très rapidement, le ministère de la Transition énergétique s’est empressé d’apporter quelques précisions. Pour lui, les estimations de la CRE ne sont « pas des hypothèses de niveau de régulation du nucléaire existant, un sujet sur lequel […] le gouvernement sera amené à faire des propositions dans les prochaines semaines ».

Il ne faut donc pas oublier une chose. Les chiffres des rapports de la CRE comme d’EDF ne forment qu’une base de travail. Celle-ci sera suivie de discussions et d’une décision publique au sujet de la nouvelle régulation, et du tarif adopté, qui verra le jour en 2026. Malgré tout, la question se pose : ces hausses attendues de coûts de production de l’électricité nucléaire impacteront-elles aussi les factures des consommateurs à l’avenir ? Pour calculer le prix que payent les clients, les composantes sont en fait diverses et le coût de production n’en est qu’une d’entre elles. Mais quand même. Rappelons que :

Cela ferait donc (encore une fois) beaucoup à supporter pour le consommateur, son budget et son pouvoir d’achat. Ces estimations réalisées par la CRE et EDF posent également une autre question : celle de la compétitivité du nucléaire. Certains, comme Greenpeace, se demandent même si l’atome représente une vraie solution pour le climat et la transition écologique. L’ONG a d’ailleurs remarqué que ces « coûts de financement discutés […] pour le nucléaire » sont « très largement supérieurs aux coûts de financement des énergies renouvelables ».

En effet, le dernier bilan prospectif de la CRE fait état d’un coût du MWh de tout type de production qui se fixerait à :

  • 80 € sur la période 2025-2026 ;
  • une fourchette comprise entre 70 et 75 € jusqu’à la fin de la décennie.

On assiste donc à une baisse régulière des coûts qui s’explique par les moyens de production d’électricité renouvelable qui arrivent sur le marché. Ces derniers sont plus compétitifs que ceux qui sont actuellement en fonctionnement. Cela provoque donc fort logiquement la baisse des coûts de production des panneaux solaires ou des éoliennes.

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