DPE : pourquoi certains acteurs veulent (encore) le modifier ?
Le Diagnostic de performance énergétique (DPE) est bien connu de tous les Français qui achètent ou louent un logement. Ce document indispensable à toute vente ou location de bien est devenu un incontournable des opérations immobilières. Déjà modifié en 2023, il continue malgré tout de faire l’objet de nombreuses critiques. C’est la raison pour laquelle certains professionnels, parlementaires et autres responsables politiques souhaitent encore rénover cet indicateur toujours plus discuté. Quels sont les arguments évoqués qui justifieraient une nouvelle réforme ? Quelles seraient les améliorations à apporter pour un DPE plus fiable et plus efficace ? Choisir.com vous livre plusieurs éléments de réponse.
Bruno Le Maire a annoncé « souhaiter » une nouvelle modification du DPE
Le DPE, Diagnostic de performance énergétique, est un document incontournable et obligatoire pour les ventes et locations immobilières. Il donne en effet une note allant de A à G aux logements selon :
- leur consommation d’énergie ;
- leur impact sur le climat.
Vers une transition écologique nécessaire et de plus en plus urgente à mettre en place, ce DPE a donc un rôle prépondérant. Depuis le 1er janvier 2023, il a d’ailleurs déjà évolué pour sanctionner les logements les plus énergivores. Un durcissement dont le but est d’inciter les propriétaires des habitations les plus consommatrices d’énergie à réaliser des travaux de rénovation. Avec un risque de poids : dès janvier 2025, les propriétaires des logements les plus mal notés (G) ne pourront plus signer ou renouveler leurs baux avec un locataire. Plus de 670 000 biens sont concernés. L’approche de cette échéance explique peut-être pourquoi la vente de logements considérés comme des passoires thermiques augmentent actuellement.
Cette nouvelle réglementation toute récente n’empêche pas de nombreuses personnes, professionnels, parlementaires ou du gouvernement, à trouver que le DPE doit encore être rénové et amélioré. C’est le cas, notamment, de Bruno Le Maire. En octobre dernier, le ministre de l’Économie a ainsi indiqué « souhaiter » qu’une nouvelle modification du DPE soit réalisée. « Changeons le diagnostic énergétique puisque visiblement, ce n’est pas le bon indicateur », a fait savoir le patron de Bercy. Il est vrai que le DPE est la cible de critiques de plus en plus fournies. Pour Bruno Le Maire, le but de ce changement serait de s’adapter notamment :
- « aux modalités de chauffage » ;
- et « à la taille des surfaces ».
En effet, l’une des critiques régulièrement émises à l’encontre du DPE est qu’il ne soit pas pertinent pour tous les biens. C’est le cas, surtout, pour les bâtiments anciens et les logements les plus petits. Ces derniers sont pourtant les habitations « les plus énergivores » d’après les chiffres de l’Observatoire national de la rénovation énergétique. Parmi les biens recevant une étiquette F ou G, on compterait ainsi :
- près de 34 % de logements de moins de 30 mètres carrés ;
- contre seulement 13 % des logements de plus de 100 mètres carrés.
Début octobre, Bruno Le Maire a ainsi affirmé que le diagnostic énergétique « pénalise les petites surfaces qui sont demandées par les étudiants ». Face à ce problème, la solution pourrait alors être la mise en place d’un DPE pondéré pour les petites surfaces.
En juillet 2023, des sénateurs ont donc proposé de « corriger les biais en défaveur des petites surfaces » et d’intégrer la protection contre la chaleur dans le calcul du DPE. Au niveau des bâtiments anciens, ils ont aussi soumis l’idée d’un DPE spécial. En effet, « le bâti réalisé avant 1947 est souvent difficile à isoler », explique le sénateur écologiste Guillaume Gontard. La raison : sa dimension historique et sa valeur patrimoniale qui compliquent ou rendent impossibles certains travaux préconisés par le DPE classique.
Dans tous les cas, un mauvais DPE entraîne une consommation d’énergie excessive. Voilà pourquoi, pour la limiter, il est recommandé de réaliser des travaux de rénovation énergétique. À défaut, pour payer moins cher, vous pouvez également essayer de changer de contrat et de fournisseur. Pour cela, le Comparateur Énergie de Choisir.com est l’outil idéal. Gratuit et facile d’accès, il compare pour vous les offres de nombreux acteurs du marché selon les critères préremplis.
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faire une simulationLe DPE, « un outil faux » manquant de fiabilité pour certains
Il est intéressant de noter que la volonté de modifier le DPE n’est pas partagée de façon unanime par l’ensemble du gouvernement. Ainsi, l’entourage de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, estime que cet indicateur est « fiable », mais « améliorable ».
Un DPE véritablement fiable ? Beaucoup de voix en doutent et critiquent au contraire le manque de fiabilité de son calcul comme de la note finale attribuée. Le 25 septembre, même Christophe Béchu en convenait. « Le fait que deux professionnels puissent aboutir à des résultats différents [pour un logement identique] pose une difficulté », avait-il confié.
Peut-être le ministre de la Transition écologique avait-il lu le dossier de 2022 du magazine 60 millions de consommateurs qui pointait déjà du doigt cette variabilité inquiétante du DPE ? Le média avait fait diagnostiquer plusieurs propriétés par cinq professionnels différents, pour des résultats loin d’être homogènes. La nécessité est donc, pour Christophe Béchu, d’« éviter que [le DPE] soit une source de contentieux entre celui qui trouverait quelqu’un qui lui expliquerait que son logement est en F et celui qui lui expliquerait qu’il est en G ».
Certains autres acteurs ont un avis bien plus tranché sur la question. Selon Christophe Demerson, directeur de publication de la revue 25 millions de propriétaires, le DPE est « un outil faux, fondé sur une mauvaise méthode de calcul ». Jean-Christophe Protais, président du Syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l’analyse et de la numérisation de l’existant (Sidiane), juge que les données recueillies sont parfois insuffisantes pour produire un diagnostic fiable. Pour remédier à cela, il propose que soit mis en place un « indice de complétude » des informations. Avec un tel indicateur, « le propriétaire est responsabilisé. Sur son DPE, s’il voit apparaître un indice de 30 %, l’acquéreur peut lui dire que le diagnostic n’est pas fiable et qu’il doit en refaire un autre », explique Jean-Christophe Protais.
La qualité de formation des diagnostiqueurs remise en question
Autre aspect qui doit encore être amélioré : la formation des diagnostiqueurs. Un arrêté d’août 2023 rendra le cadre de leur certification plus sévère dès le 1er juillet 2024. Le but : « renforcer la formation initiale, les contrôles et la formation continue ». Cependant, selon Yannick Ainouche, président de la Chambre des diagnostiqueurs immobiliers de la Fnaim, « c’est insuffisant ». « Il n’y a même pas un diplôme pour devenir diagnostiqueur », déplore-t-il, ce pour quoi il milite justement. Ainsi, il désire que se crée « une vraie filière, avec une véritable convention collective et une véritable branche professionnelle ». L’objectif : permettre « une montée en compétences de l’ensemble de la filière », pour des DPE plus fiables, en plus d’attirer des étudiants.
Le problème du manque de formation des diagnostiqueurs s’accompagne aussi de celui de la fraude, réelle dans ce secteur. En effet, il n’y a aucun organisme de contrôle de ces professionnels. Certains d’entre eux travaillent donc sans :
- certification ;
- assurance ;
- enregistrer leurs DPE à l’Ademe, l’Agence de la transition écologique.
Voilà pourquoi plusieurs fédérations du diagnostic immobilier réclament la création d’une carte professionnelle dédiée aux diagnostiqueurs, renouvelable chaque année et retirable en cas de faute. Yannick Ainouche estime que « cette carte professionnelle permettrait d’attester de la responsabilité civile professionnelle, de la mise à jour des diplômes et des certifications ». Ainsi, son intérêt serait que « le consommateur soit sûr que le diagnostiqueur est en règle. C’est la moindre des choses ».
Autre piste évoquée pour éviter les problèmes de fraudes ou de pressions de la part de propriétaires ou d’agents immobiliers : faire réaliser régulièrement le DPE. Il pourrait être effectué « tous les 5 ou 10 ans » selon Jean-Christophe Protais. « Cela permet de sortir de l’urgence » de la nécessité de la vente ou de la location, qui peut engendrer ces pressions, explique-t-il. Yannick Ainouche conclut en affirmant que les diagnostiqueurs doivent finalement être « un tiers de confiance d’une rectitude absolue ».
Alors, le DPE sera-t-il une nouvelle fois modifié ? Rien n’est moins sûr. En effet, le ministère du Logement est contre l’idée d’une nouvelle réforme de cet indicateur. « Il n’est pas prévu d’engager une évolution à court terme du DPE, ni sur la méthode de calcul ni sur les modalités », a fait savoir l’entourage du ministre chargé du Logement, Patrice Vergriete. La même source indique que le diagnostic énergétique, auquel certains bâtiments ne sont pas soumis, « est aujourd’hui un outil fiable et mieux adapté aux attentes des particuliers ». Un avis loin d’être partagé par tout le monde.
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