Émissions carbone : 90 % de réduction en Europe d’ici 2040 ?

Une quasi-neutralité carbone en Europe à l’horizon 2040. C’est l’objectif énoncé, début février, par la Commission européenne, avec une barre de réduction des émissions de CO2 fixée à 90 % à cette date. Les moyens envisagés pour tenir cet engagement ambitieux : le déploiement des énergies décarbonées comme le recours aux technologies de captage et de stockage de CO2. Choisir.com revient sur les principales annonces contenues dans ces recommandations de l’exécutif européen.

réduction CO2 Europe 2040

L’Union européenne intensifie ses objectifs sur la voie de la neutralité carbone

Plus les jours passent, plus l’accélération de la transition énergétique devient toujours plus cruciale. Dans l’Union européenne (UE), la neutralité carbone espérée devrait être atteinte officiellement en 2050, soit dans à peine plus de vingt-cinq ans. Voilà pourquoi, dans un communiqué de presse, la Commission européenne a rendu publiques ses recommandations en matière d’objectifs climatiques à l’horizon 2040. C’était en fait une obligation pour l’exécutif continental de dévoiler son plan post-2030 dans un délai de 6 mois suivant la COP28 de Dubaï. En décembre 2023, cette dernière s’était conclue par la signature d’un texte appelant à une « transition hors des énergies fossiles ».

Ainsi, ces recommandations, publiées le 6 février 2024, ont réalisé deux grandes annonces puisqu’elles :

  • prônent une réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) vis-à-vis de leur niveau de 1990 ;
  • ouvrent la porte aux techniques et technologies de captage et de stockage du carbone, spécialement dans le domaine industriel.

Toutefois, aucune obligation contraignante au niveau juridique n’a encore été établie à destination des pays membres ou des acteurs industriels. Tout cela devrait se mettre en place après les élections européennes du mois de juin prochain. C’est seulement à la suite de cette échéance qu’« une proposition législative sera présentée », en accord avec le Parlement et les Vingt-Sept, d’après la Commission.

Dès la mi-2023, le Conseil consultatif scientifique sur le changement climatique de l’UE avait en réalité rendu un rapport servant de base de travail. Ayant fuité dans les médias, il appelait déjà à un objectif de -90 % d’émissions en 2040. Ce même document formulait aussi des pistes pour décarboner l’agriculture à cette date, secteur représentant 11 % du bilan européen en la matière.

Autre proposition envisagée et finalement non-retenue par Bruxelles : un objectif d’émission pour 2040 moins élevé, à -80 % voire -85/90 %. La raison est que ce scénario ne prévoit « le déploiement de nouvelles technologies » que sur la période 2041-2050. En conséquence, aux yeux de la Commission, il « risque de ne pas aboutir à la neutralité climatique d’ici 2050 ».

Pour certains experts, comme Simone Tagliapietra, du groupe de réflexion Bruegel, l’objectif retenu par l’UE est finalement autant synonyme de « continuité » qu’il est « révolutionnaire ». Si les -90 % se réalisaient en 2040, cela impliquerait que le continent n’émettrait plus :

  • que 500 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an ;
  • contre 3 300 millions de tonnes rejetées en 2022 !

Au niveau mondial, cette année-là a d’ailleurs été synonyme d’émissions record de CO2 dans le domaine de l’énergie. Avant de se projeter vers 2040, la Commission juge que la priorité « est la mise en œuvre intégrale de la législation existante » pour 2030. Celle-ci doit aboutir à une réduction d’au moins 55 % des émissions de GES à cette date. Ne pas remplir cet objectif pour la fin de la décennie enverrait inéluctablement un signal négatif sur la capacité de l’UE de réaliser celui, bien plus ambitieux, fixé pour 2040. Une éventualité à ne pas écarter puisque la trajectoire obtenue grâce aux actions actuelles des États membres ne permettrait qu’une baisse de 51 % seulement. En France, le compte n’y est d’ailleurs pas en ce qui concerne le déploiement des énergies renouvelables.

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D’immenses investissements nécessaires pour réaliser la transition écologique

Sur cette trajectoire de diminution attendue pour 2040, la Commission prévoit, pour 2035, une « décarbonation quasi-totale de l’électricité ». Cependant, parvenir à respecter cet engagement de -90 % d’émissions ne sera guère une tâche aisée. Aux yeux de la Commission européenne, un fait est d’ailleurs une évidence. Cet objectif ne sera réalisable qu’avec des « investissements plus rapides pour le développement de nouvelles technologies de réduction » de ces émissions « entre 2031 et 2040 ». Ont été citées comme possibilités :

  • « la production d’hydrogène par électrolyse ». Cette méthode peut, par exemple, permettre de produire un gaz plus favorable à l’environnement, tels de :
  • « le stockage et l’utilisation du carbone » ;
  • « l’élimination du carbone dans l’industrie ».

Problème : le développement de ces technologies aura un coût absolument gigantesque, comme l’indique le tableau suivant :

Investissements par an à réaliser entre 2031 et 2050 pour atteindre la neutralité carbone dans l’UE
en eurosen % du PIB de l’UE
dans le domaine énergétiqueEnviron 660 milliards d’€3,2 %
dans le domaine des transportsEnviron 870 milliards d’€4,2 %

Toutefois, ne rien faire coûte tout aussi cher. La Commission européenne a précisé que les dommages économiques liés au climat avaient représenté, sur les 5 dernières années, un coût de 170 milliards d’euros. De plus, des « estimations prudentes » indiquent même que l’inaction face à l’aggravation du dérèglement climatique « pourrait faire baisser le PIB de l’UE d’environ 7 % d’ici à la fin du siècle ».

De plus, les énergies fossiles, auxquelles l’Europe est très dépendante aujourd’hui, représentaient également plus de 4 % du PIB de l’Union en 2022. C’est dire si la réduction des émissions et le basculement vers des productions décarbonées peuvent être des facteurs importants d’économie. Elles pourraient aussi, selon l’exécutif continental, « renforcer la résilience de l’Europe face aux crises futures ». Voilà pourquoi l’objectif est d’atteindre « une décarbonation complète » du secteur de l’énergie pour 2040-2050. Tous les leviers disponibles sont à actionner dans ce but, en premier lieu « les énergies renouvelables [et] le nucléaire ».

La Commission européenne valide le recours aux technologies de captage et de stockage de carbone

Principale nouveauté de ce plan européen pour 2040, l’ouverture de la voie aux technologies d’absorption de carbone. « La réalisation de cet objectif de 90 % recommandé nécessitera à la fois des réductions des émissions et des absorptions de carbone », a affirmé la Commission. Selon elle, trois moyens sont à utiliser :

  • le captage de carbone ;
  • son stockage ;
  • l’utilisation du carbone capté dans l’industrie.

Pour Bruxelles, « le captage du carbone devrait cibler les secteurs difficiles à réduire », tels que les domaines industriels, des transports ou de l’agriculture notamment. Pour l’exécutif européen, pas de doute : ce dernier secteur « peut également jouer un rôle dans la transition » écologique à accomplir et approfondir. Il affirme aussi que ces absorptions seront très utiles afin de donner le jour à « des émissions négatives après 2050 ». Ainsi, les estimations de l’UE avancent le fait qu’en 2040, le niveau de l’absorption du carbone devrait avoisiner les 400 millions de tonnes d’équivalent CO2.

Néanmoins, beaucoup d’associations et de groupes environnementaux jugent cette politique très risquée. La raison : à leurs yeux, l’autorisation de l’absorption du carbone pourrait limiter la volonté des entreprises à diminuer leur empreinte carbone. Voilà l’avis de Carbon Market Watch, association à but non lucratif spécialisée dans la tarification du carbone. Pour elle, cette ouverture « pourrait avoir pour conséquence de retarder les réductions d’émissions ou de les remplacer par des promesses d’absorptions ou de stockage futures ». Ce qui serait loin d’être la même chose qu’une baisse réelle des émissions de CO2 sur le continent…

Il ne faut enfin pas oublier que rien n’est encore fait ni marqué dans le marbre européen. En effet, l’ensemble de ces pistes et chiffres ne sont, pour l’instant, que des « recommandations ». Il appartiendra à la nouvelle Commission européenne qui siégera après les élections de juin 2024 de mettre sur pied une proposition législative à même de rallier l’adhésion des 27 États membres. Ce qui ne sera sans doute pas simple. Pour Pascal Canfin (Renew), président de la Commission environnement du Parlement, « la poursuite de la transition verte est l’un des grands enjeux de l’élection ».

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