Renouvelables : la première route solaire de France détruite

C’est un aménagement qui devait permettre à la France de mettre un coup d’accélérateur sur la voie de la transition énergétique. En décembre 2016, dans l’Orne, était inaugurée la première route solaire de France. Moins de 7 ans plus tard, l’expérimentation a pris fin dans la déception. Loin de répondre aux espérances placées en elle, cette portion de départementale pavée de panneaux solaires se trouve aujourd’hui en pleine démolition. Pour autant, au moment de dresser le bilan de ce test, tout n’est peut-être pas négatif.

démolition route solaire

La démolition a commencé pour la première route solaire de France

C’est en décembre 2016, à Tourouvre au Perche, dans l’Orne, que s’ouvrait la première route solaire de France. Inaugurée en grande pompe par la ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer d’alors, Ségolène Royal, elle était synonyme pour l’État :

  • d’investissement majeur, s’élevant à 5 millions d’euros ;
  • d’un pas important réalisé sur la voie de la transition écologique ;
  • du point de départ d’une volonté ambitieuse. Cette dernière était d’étendre cette technologie sur 1 000 km le long des routes de France à l’horizon 2020. « Ce n’est qu’un début », clamait alors fièrement la ministre.

Quatre ans après cette date, le constat est sans appel. Cette ambition est loin de s’être réalisée, bien au contraire. En effet, à Tourouvre :

  • le conseil municipal a décidé, en février, de mettre fin à l’expérimentation de cette route solaire. Celle-ci s’étendait initialement sur une longueur de 1 km sur la Départementale 5 en sortie du village ;
  • la destruction de cette infrastructure a même débuté à la fin du mois de mai 2024. Elle doit durer jusqu’au 7 juin.

Pourquoi une telle décision ? Elle s’explique par les multiples dysfonctionnements ayant eu lieu depuis 2016. La route a été construite par l’entreprise de travaux publics Colas, filiale du groupe Bouygues, et sa propre filiale Wattway. Le but : aménager une route de panneaux solaires photovoltaïques permettant de générer de l’électricité. Le trafic quotidien des véhicules roulant dessus ne devait pas affecter négativement cette production d’électricité. Malheureusement, les problèmes techniques rencontrés dans le cadre de son utilisation furent donc très réguliers :

  • nuisances sonores ;
  • affaissements de terrain ;
  • encrassement des cellules photovoltaïques.

Résultat : cette portion de la D5 a souvent dû être fermée pour cause de travaux et de réparations. De plus, la route solaire devait produire une quantité intéressante d’électricité. Or, ce fut loin d’être le cas, puisqu’elle n’a jamais permis d’alimenter davantage que trois foyers. Le réseau d’éclairage de la commune n’a pas pu non plus compter sur cet aménagement pour fonctionner, comme c’était escompté à la base. Par conséquent, le rendement de cette installation a été bien en deçà des espérances.

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Malgré des travaux et le remplacement de dalles, la route solaire a déçu à Tourouvre

Les dalles photovoltaïques mises au point par Wattway étaient collées directement sur le revêtement existant de la route. L’avantage vanté par l’entreprise : la possibilité de produire de l’électricité « sans empiéter sur les surfaces agricoles et les paysages naturels ».

Le problème, c’est donc qu’elles n’ont pas fonctionné aussi bien que prévu en 2016 :

  • jusqu’en 2019 s’est étendue la première phase d’expérimentation sur le tronçon long de 1 km ;
  • puis la deuxième phase d’expérimentation s’est ouverte sur une portion réduite de 400 mètres. De 2020 à 2021 ont alors été installés sur cette distance deux lots de 576 dalles solaires de nouvelle génération. Cependant, ce changement n’a pas permis d’augmenter de façon significative la production d’énergie solaire.

Voilà pourquoi l’ensemble de ces dalles sont en train d’être démontées, suite à une décision teintée d’amertume et d’un sentiment de déception et d’échec. La route faisait face à de plus en plus de critiques et de plaintes, les travaux réguliers compliquant considérablement la mobilité des habitants. Cette opération de destruction se réalise en suivant plusieurs étapes distinctes :

  1. d’abord, la dépose des coffrets électriques :
  2. ensuite, la destruction du muret longeant la route sur 1 km. Sur ce dernier se trouvait une fresque de cheval lancé à vive allure, dessinée en 2019 par un collectif de graffeurs nantais ;
  3. enfin, l’enlèvement des panneaux solaires placés au sol.

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Au contraire, pour Wattway, cette expérience est un « succès »

Face à ce terne bilan, les responsables de Wattway concèdent que leurs panneaux photovoltaïques « ne sont pas adaptés à une route standard ». Pour autant, ils voient malgré tout dans cette expérience plusieurs motifs de satisfaction.

Etienne Gaudin est le directeur de la société. En février, il reconnaissait déjà que cette route représentait « un laboratoire à grande échelle avec un trafic conséquent », entre véhicules agricoles, camions et automobiles. La route solaire testée dans l’Orne a en réalité permis l’accélération du perfectionnement de cette technologie novatrice. Etienne Gaudin assure qu’« on a beaucoup appris à Tourouvre ». Il explique également que « la solution installée en 2020 […] a été commercialisée dans une cinquantaine de sites ».

Grâce à elle, Wattway a effectivement développé des dalles solaires utilisées pour des pistes cyclables. Ces dernières ont notamment été installées à Grave, aux Pays-Bas, permettant de produire de l’énergie renouvelable renvoyée sur le réseau électrique. Autre usage possible de cette électricité : le rechargement des stations pour vélos électriques.

C’est simple, pour Etienne Gaudin, « dans la compétition mondiale, nous sommes les plus avancés sur le sujet ». Voilà pourquoi il voit dans l’expérimentation ornaise un « succès », malgré les dysfonctionnements ayant entraîné son démantèlement.

Quant aux panneaux solaires récupérés à Tourouvre, ils devront ensuite passer par une analyse complète. Le but : récolter des informations utiles pour l’avenir de ce secteur. Cette phase de travail doit permettre de trouver des réponses entourant de nombreuses questions touchant notamment :

  • à l’évolution des matériaux ;
  • au vieillissement des dispositifs de fixation ;
  • à la sensibilité aux UV des vernis protecteurs utilisés ;
  • aux méthodes de poses et aux impacts qu’elles causent.

Non loin, au Mans, c’est une grande centrale de 42 000 panneaux solaires qui commencera à produire de l’électricité dès le mois de juin.

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