Recyclage des batteries de voiture : les ambitions d’une start-up
Mecaware est une jeune start-up lyonnaise travaillant dans le domaine du recyclage des batteries de voiture. Son objectif : accélérer la transition énergétique et limiter la dépendance européenne au sujet des métaux critiques vis-à-vis de la Chine. Pour cela, elle a obtenu une subvention de la part de Bruxelles devant l’aider à passer de la phase des tests à l’échelle industrielle. Son ambition à terme : recycler chaque année environ 15 000 tonnes de métaux composant les batteries.
Mecaware, une start-up cherchant à recycler les batteries des voitures en réutilisant les métaux critiques qui les composent
Implantée à Vénissieux, Mecaware est une toute jeune entreprise lyonnaise spécialisée dans le recyclage des batteries des véhicules électriques. Pour l’indépendance comme la sécurité industrielle européenne, en vue de la transition écologique à mener, il s’agit en réalité d’un secteur clé.
Arnaud Villers d’Arbouet est l’un des cofondateurs et le président de Mecaware. Il confie que la dépendance des États européens vis-à-vis d’autres pays concernant les matières premières nécessaires pour fabriquer des batteries peut atteindre 98 % ! Une large part de ces matériaux proviennent généralement d’Asie et plus spécifiquement de Chine. Un problème dont est bien consciente l’Union européenne (UE). Voilà pourquoi Bruxelles soutient Mecaware avec un double objectif en tête :
- faire face aux défis de la réutilisation des métaux rares ;
- réduire la dépendance continentale par rapport à la Chine, poids lourd international dans le secteur de la mobilité électrique.
En tout cas, développer les possibilités de mobilité décarbonée est effectivement essentiel face à l’urgence climatique. Ces derniers mois, plusieurs autres nouveautés ont eu le mérite de lancer des pistes pour avancer sur le sujet :
- Paris est déjà la ville du monde proposant le plus de taxis à hydrogène à ses habitants. Pour les Jeux olympiques 2024, l’offre de taxis roulant à l’hydrogène vert devrait être multipliée par trois ;
- en avril, TotalEnergies a lancé Charge+, une nouvelle carte mobilité pour simplifier le rechargement des véhicules électriques ;
- lancé en début d’année, le leasing social, permettant de louer un véhicule électrique à des tarifs préférentiels, a rencontré un vif succès dans le pays.
En ce qui concerne le projet de Mecaware, la start-up se trouve encore dans une phase d’expérimentation pilote. Son but est de passer, d’ici 2025-2028, à l’échelle industrielle. Elle effectue donc pour l’instant des tests en conditions réelles mais à échelle réduite.
D’ici 2035, l’Europe compte interdire les véhicules thermiques. Le secteur industriel de la mobilité décarbonée et des batteries est donc en pleine expansion. Dans ce cadre, Mecaware souhaite « accélérer l’autonomie stratégique » du continent. Le moyen : « la circularité des ressources et […] l’intelligence du cycle matière », grâce au recyclage. C’est d’ailleurs l’un des rares acteurs français à s’être emparé de cette question clé.
Concrètement, l’action du groupe vise à extraire les métaux composant les batteries en fin de vie, tels que :
- le lithium ;
- le cobalt ;
- le nickel ;
- le manganèse ;
- l’aluminium ;
- le cuivre ;
- ou le fer.
Ces minerais et métaux sont dits « critiques » du fait de leur rareté, de leur importance industrielle et économique élevée. Ainsi, l’activité de Mecaware devrait pouvoir soulager les « tensions » redoutées par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) sur la question de leur approvisionnement mondial. Cette organisation a d’ailleurs récemment publié un rapport indiquant qu’il faut aussi accélérer le déploiement des renouvelables sur la planète pour tenir les objectifs climatiques.
Le procédé employé par Mecaware a été créé sous l’égide du CNRS. Il consiste à extraire la « black mass », une poudre noire constituée de différents métaux. Le procédé utilisé, totalement novateur, se base sur le captage du CO2. Julien Leclaire est un autre cofondateur et conseiller scientifique de Mecaware, dont le nom est l’acronyme de « MEtal CApture for WAste REcycling ». Il explique avoir « mis en place une synergie entre le captage de CO2 et le recyclage de métaux ». Autre avantage : « L’extraction se fait en circuit fermé ». Le but est de capter le CO2 dans les fumées d’usines adjacentes au site de production. Julien Leclaire ajoute que ce sont « les propriétés solubilisantes des amines qui captent le CO2. En modulant les quantités de CO2, on va ainsi faire précipiter tel ou tel métal ». Cette opération permet donc à chaque métal présent d’être séparé pour retrouver son état d’origine et être réutilisé. Dans le domaine du captage et stockage de CO2, plusieurs projets devraient se lancer en 2025 en France.
Un expert proche de la start-up, resté anonyme, a été interrogé par le média Euractiv. De son point de vue, le dispositif pilote de Mecaware fait face à « de gros défis ». Pour autant, il pense qu’à terme, c’est une « solution […] extrêmement intéressante » qui devrait naître de ces travaux. La même source reconnaît d’ailleurs que « dans l’industrie de la batterie, la circularité va devenir fondamentale ».
À ce propos, un nouveau « Règlement européen sur les métaux critiques » est appliqué depuis fin mai sur le continent. Il fixe des objectifs chiffrés devant permettre de limiter la dépendance européenne. Ces derniers sont qu’il y ait :
- 25 % de métaux critiques provenant de matières recyclées en Europe ;
- 40 % issus de l’importation, mais raffinés sur le Vieux continent ;
- 10 % extraits de mines européennes.
De votre côté, vous roulez déjà à l’électrique au quotidien ? Si vous cherchez une nouvelle offre adaptée à vos besoins en mobilité, pensez à utiliser le Comparateur Électricité de Choisir.com.
Êtes-vous sûr de ne pas payer votre électricité trop cher ?
faire une simulationDeux projets d’usines de recyclage de batteries dans les Hauts-de-France, aidés par des subventions européennes
En décembre 2023, Mecaware a obtenu, avec ses partenaires, une subvention de 6 millions d’euros de la part de l’UE. Celle-ci a pris place dans le cadre d’une levée de fonds ayant permis à la start-up de récolter 40 millions d’euros pour financer sa phase de préindustrialisation.
L’aide de Bruxelles vient en réalité du Fonds européen pour une transition juste. Il s’agit d’un mécanisme de soutien de l’Union cherchant à :
- soutenir des régions industrielles sujettes à des difficultés socio-économiques et fortement émettrices de CO2 ;
- aider ces dernières à s’élancer vers la « neutralité climatique » tout en restant compétitif d’un point de vue industriel.
Le fonds dispose, au total, d’un budget de 17,5 milliards d’euros pour la période 2021-2027, dont 228 millions sont gérés par la région des Hauts-de-France.
Arnaud Villers d’Arbouet indique que l’obtention de cette enveloppe « importante » a été plus qu’utile. Elle a permis à la société de « poursuivre ses projets de recherche avec des entreprises et des laboratoires ». Étape fondamentale afin « d’améliorer la chimie que l’on a » et que les innovations mises au point basculent « à l’échelle industrielle ».
Le « pilote pré-industriel » sur lequel la start-up travaille doit pouvoir extraire 50 à 70 tonnes de métaux par an. Sa diffusion industrielle, prévue dans les Haut-de-France, doit se réaliser en suivant plusieurs étapes :
- en 2025, le pilote sera installé sur l’ex-usine de pneus Bridgestone à Béthune, dans le Pas-de-Calais. À l’horizon 2028, l’objectif est de créer une véritable usine dotée d’une ligne industrielle permettant :
- l’extraction de 7 500 tonnes de métaux par an,
- la création, à terme, de 100 emplois ;
- en 2025, une autre start-up française, Verkor, doit commencer à produire des batteries dans une nouvelle usine près de Dunkerque (Nord), principalement pour Renault. Ainsi, Mecaware planche actuellement sur la possibilité d’une deuxième usine accolée à ce site, d’une même capacité de 7 500 tonnes par an. Son souhait : recycler les « chutes de production ».
Gilles Moreau, porte-parole de Verkor, indique que l’ambition est de « créer un écosystème local ». Il l’assure : « on travaille avec [Mecaware] et on les soutient ». De son côté, Arnaud Villers d’Arbouet explique que la volonté est de « dupliquer ce modèle [partout] où il y a des gisements ». Il va même jusqu’à affirmer que « notre territoire [est une] mine de déchets » à exploiter. Avec ces deux futures usines, la société pourrait alors recycler approximativement 15 000 tonnes de matériaux critiques par an.
La localisation de ces futures usines de recyclage de batteries ne doit rien au hasard. De Dunkerque au bassin minier, Mecaware trouvera effectivement à proximité des fabricants de batteries pour véhicules électriques. Quatre méga-usines sont en train de s’installer, grâce à des aides publiques conséquentes provenant de France comme de l’UE.
Ces aménagements industriels sont en totale cohésion avec le projet de loi industrie verte porté par l’exécutif. Celui-ci vise à :
- réindustrialiser le territoire national ;
- détacher la France de la dépendance chinoise.
Retrouver une meilleure souveraineté industrielle et énergétique est d’une importance cruciale pour mettre en œuvre les objectifs climatiques européens. Pour rappel, ces derniers sont :
- de diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 90 % d’ici 2040 sur le continent ;
- d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.
Preuve que les actions environnementales favorisant les énergies décarbonées portent leur fruit, les émissions de CO2 ont connu une forte baisse en Europe en 2023. Elles ont également, sur la même période, connu une chute de 5,8 % en France, ce qui est positif mais pas encore suffisant.
Et si vous souscriviez une offre d'énergie verte ?
Nos experts énergie calculent pour vous les économies que vous pourriez faire sur votre facture d’électricité