L’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie en France

Ces vingt dernières années, les marchés de l’électricité et du gaz en France ont subi de nombreuses mutations. Pour comprendre les décisions prises actuellement par les pouvoirs publics concernant ces marchés, il est utile de revenir sur l’histoire de l’énergie en France et la direction prise au niveau européen. La tendance est clairement à la libéralisation des marchés, dans le but de créer un « marché intérieur de l’énergie » à l’échelle de l’Union européenne.

libéralisation du marché de l'énergie

Qu’est-ce que la libéralisation du marché de l’énergie ?

La définition de la libéralisation d’un marché est plutôt simple : il s’agit de supprimer les obstacles à la concurrence, de mettre fin à un monopole régissant un marché (ou à son caractère monopolistique). Concrètement, dans le cas du marché de l’énergie en France, il s’agissait de modifier son fonctionnement pour que des entreprises privées puissent concurrencer EDF et GDF (aujourd’hui appelé Engie).

La libéralisation du marché de l’énergie, ou ouverture à la concurrence, a été en France synonyme de privatisation des géants de l’énergie : EDF tout d’abord puis Engie. Cela signifie que ces entreprises qui appartenaient à l’État voient arriver des investisseurs privés qui sont alors en mesure de peser dans les décisions stratégiques de ces fournisseurs.

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Historique du marché de l’énergie en France

Pour comprendre l’organisation des marchés de l’électricité et du gaz en France, il faut revenir à la Seconde Guerre mondiale et aux décisions prises à l’aube des Trente Glorieuses dans le but de reconstruire la France sur le modèle imaginé par le Conseil national de la Résistance (CNR).

Première moitié du XXe siècle

Au début du XXe siècle, la France utilise encore beaucoup de charbon qu’elle extrait de ses mines situées principalement dans le Nord, en Alsace et en Lorraine. Pour les transports, c’est le pétrole raffiné qui prend le dessus dès la fin du siècle précédent. Or, la France dépend entièrement des importations pour cette énergie, et la Première Guerre mondiale met clairement en évidence la dimension politique du contrôle des approvisionnements.

Dans l’entre-deux-guerres, l’État décide d’assurer une régulation plus importante de ce marché en pleine expansion, jusque-là entièrement contrôlé par des entrepreneurs. Toutefois, l’approvisionnement, la production, le transport et la distribution d’énergie restent des activités gérées localement par des entreprises privées. Les pouvoirs publics décident notamment du développement de l’hydroélectricité (construction de barrages et infrastructures nécessaires) et encouragent l’établissement de centrales thermiques au charbon.

Durant la Seconde Guerre mondiale, c’est l’énergie nucléaire qui est au centre de la recherche scientifique, principalement dans l’optique d’y trouver un avantage militaire.

Nationalisations de l’après-guerre

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, dans un pays entièrement à reconstruire, l’importance de continuer la recherche nucléaire semble bien comprise, et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) est créé dès le 18 octobre 1945.

Par la suite, les pouvoirs publics s’inspirent grandement du programme du CNR en ce qui concerne le marché de l’énergie. C’est ainsi que, le 8 avril 1946, la loi sur la nationalisation de l’électricité et du gaz est votée au Parlement : EDF et GDF viennent d’être créées et rassemblent sous le contrôle de l’État une grande partie des entreprises privées du secteur. Certaines sociétés privées gérant la distribution et la fourniture d’électricité et/ou de gaz choisissent de ne pas rejoindre les entreprises publiques ; elles restent indépendantes et sont aujourd’hui appelées Entreprises Locales de Distribution (ELD).

Le 17 mai 1946, c’est l’industrie charbonnière qui est nationalisée : cette énergie est encore très utilisée par les particuliers et entreprises, et il est urgent de rétablir la production et l’acheminement du charbon en France, deux activités très fortement ralenties à cause de l’occupation.

Dans les décennies suivantes, jusqu’à la fin du siècle, c’est donc l’État qui a pris toutes les grandes décisions stratégiques pour ce secteur : développement du nucléaire civil, exploitation du gaz naturel, arrêt progressif de l’extraction du charbon, investissement dans le parc hydroélectrique, etc.

Libéralisation voulue par l’Union européenne

L’Union européenne a elle aussi été créée à la suite de la Seconde Guerre mondiale, et cherche à renforcer les liens diplomatiques et économiques entre ses membres. La création d’un marché commun est au centre du projet depuis ses débuts : concentrant à l’origine ses efforts sur le charbon et l’acier, l’Europe intégrera petit à petit de très nombreuses branches de l’économie au marché intérieur.

C’est en décembre 1996 qu’une directive européenne portant sur l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité de chaque état membre est adoptée. Chacun de ces pays doit alors transposer ce texte dans ses propres lois. Une directive portant sur les marchés européens du gaz naturel sera votée un an et demi plus tard, en juin 1998.

La France choisit alors de suivre ces deux directives de manière progressive, et le calendrier choisi a été :

  • février 1999, possibilité de choisir son fournisseur pour les entreprises consommant plus de 100 GWh par an ;
  • février 2000, libéralisation pour les entreprises consommant plus de 16 GWh par an ;
  • février 2003, ouverture du marché pour les entreprises consommant plus de 7 GWh par an ;
  • juillet 2004, libre choix du fournisseur pour toutes les entreprises, copropriétés et collectivités locales ;
  • août 2004, séparation des activités de production, transport, distribution et fourniture de l’énergie ;
  • juillet 2007, ouverture du marché du gaz et de l’électricité pour les particuliers qui peuvent comparer les offres d’énergie pour souscrire la plus attractive ;
  • janvier 2016, fin des tarifs réglementés pour les entreprises dont la puissance souscrite est strictement supérieure à 36 kVA. Celles-ci doivent donc choisir une offre à prix de marché.

Pour en apprendre plus sur certains acteurs du marché de l’énergie :

Pourquoi le marché de l’énergie a-t-il été ouvert ?

Le but de la libéralisation des marchés de l’électricité et du gaz en Europe est de passer de plusieurs marchés nationaux indépendants à un seul marché intégré. L’objectif est de faciliter la concurrence au niveau européen ce qui, dans la croyance néolibérale, doit assurer un prix juste pour les consommateurs et garantir une certaine une sécurité d’approvisionnement, un mécanisme de capacité sur le marché de l’énergie.

De plus, l’Union européenne a été fondée sur la conviction qu’une très forte intégration économique (ou le fait de n’avoir qu’un seul marché pour tous les pays membres) était le secret d’une collaboration assurée entre ses membres. Tous étant interdépendants, une guerre entre eux devient donc impossible. Cela explique qu’un grand nombre des directives européennes a pour but de construire un marché intérieur puissant. Entre autre l’Epex Spot (la bourse de l’électricité), l’ARENH, ou encore le marché du carbone européen.

En savoir plus

Face à la crise énergétique ayant eu un impact sur l’économie mondiale qui a débuté en 2022 et se poursuit en 2023, les dirigeants européens réfléchissent à décorréler les prix de l’électricité et du gaz. Consultez notre article dédié pour comprendre le mécanisme d’attribution des tarifs de l’électricité.

Avantages et inconvénients de la libéralisation

Comme la grande majorité des décisions politiques, l’ouverture du marché de l’énergie à la concurrence a en même temps rempli certains de ses objectifs et soulevé de vives critiques. Pour y voir plus clair, nous avons regroupé dans le tableau ci-dessous les principales avancées obtenues grâce à cette décision et les problèmes qu’elle a entraîné.

Conséquences de l’ouverture à la concurrence – Marché de l’énergie en France
Avantages Inconvénients
Un large choix d’offres pour s’adapter à tous les consommateursUne augmentation constante des prix de l’électricité qui aurait pu être maîtrisée par les pouvoirs publics dans le cadre d’un marché nationalisé
Une apparition de nouveaux services (offres connectées, nouvelles options tarifaires, etc.)Un nombre très important de fournisseurs qui semble annoncer la disparition prochaine de certains d’entre eux
La possibilité de comparer les différents fournisseurs de manière transparenteUn démarchage parfois abusif, pouvant mener à des ventes forcées

Bon à savoir :

Le médiateur national de l’énergie, structure indépendante, est là pour favoriser le règlement de litiges entre consommateurs et fournisseurs.

Les activités qui restent des services publics

Il est important de souligner que, lorsque l’on parle d’ouverture du marché de l’énergie, c’est de l’activité de fourniture d’électricité et de gaz dont on parle. Autrement dit, c’est la vente d’énergie par un fournisseur à un client final, qu’il s’agisse d’un particulier ou professionnel, qui est concernée. Pour que ces clients puissent recevoir et utiliser cette énergie, d’autres acteurs sont actifs sur le marché, et sont quant à eux restés des services publics ; il s’agit des activités :

  • de transport, avec RTE pour l’électricité et GRTgaz et TIGF pour le gaz ;
  • de la distribution avec Enedis pour l’électricité, GRDF pour le gaz et des ELD gaz et/ou électricité sur environ 5 % du territoire. Enedis et GRDF sont responsable de la bonne fonctionnalité de leur réseau de distribution, et avec leurs prestataires, de l’installation de compteur communicants.

En savoir plus :

En plus de l’ouverture des marchés, les marchés de l’énergie se penchent sur les questions climatiques :

la Loi NOME
la loi hydrocarbures de 2017

Le futur du marché de l’énergie en France

En France, l’État a choisi de garder encore un certain contrôle sur le marché de l’énergie en conservant les Tarifs Réglementés de Vente (TRV) de l’électricité et du gaz pour les petits consommateurs. Ces grilles tarifaires sont fixées par les pouvoirs publics et la CRE et sont pour le moment toujours commercialisées. Toutefois, le TRV du gaz va être supprimé en 2023, et il ne sera alors plus possible de souscrire que des offres de marché, dont les prix sont établis librement par les fournisseurs.

En ce qui concerne la disparition du TRV de l’électricité pour les particuliers et professionnels dont la puissance souscrite est égale à 36 kVA au plus, elle n’est pas programmée pour l’instant. En effet, cette énergie est utilisée par tous et est assimilée à un bien de première nécessité.

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