Prix du pétrole : l’Arabie saoudite cherche à le faire remonter !
Le premier week-end de juin a vu les pays de l’OPEP se réunir pour une rencontre se déroulant à Vienne, en Autriche. À cette occasion, l’Arabie saoudite, véritable poids lourd de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, a pris une décision forte. Ce pays du Golfe persique a annoncé le dimanche 4 juin 2023 qu’il allait faire de nouvelles coupes drastiques dans sa production de pétrole. Son but par cette mesure : favoriser la remontée des prix du baril de l’or noir, actuellement en berne. Quelle sera l’importance de cette baisse de production annoncée ? Qu’en est-il des autres États membres de l’OPEP ? Les consommateurs subiront-ils la conséquence d’une telle décision par une hausse des prix à la pompe ? Choisir.com vous livre plusieurs clés pour y voir plus clair.
Sabrer sa production de pétrole pour faire remonter les cours : l’option choisie par l’Arabie saoudite
Dimanche 4 juin dernier, la réunion semestrielle de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) a eu lieu en Autriche, à Vienne. Treize pays sont membres de cette organisation, auxquels s’ajoutent également dix États partenaires, conduits par la Russie. Tous présents au cours du rendez-vous autrichien, ces 23 participants forment l’OPEP+. Ils représentent même 60 % de la production mondiale de l’or noir.
L’Arabie saoudite est l’un des États les plus influents de ce groupe. Le 4 juin, il a annoncé avoir décidé de réaliser une nouvelle coupe dans sa production. Le but : faire remonter les cours du pétrole qui sont actuellement en berne. La référence du pétrole brut s’échange effectivement aujourd’hui :
- pour le Brent, la référence en Europe, à 76 dollars le baril ;
- pour le WTI, son équivalent américain, à 71 dollars le baril.
Ce niveau est donc très éloigné du pic atteignant les 140 dollars enregistré en mars 2022, juste après le début de la guerre en Ukraine. C’est ce contexte géopolitique particulier de l’invasion russe de l’Ukraine qui, lancée en février 2022, a été l’une des causes d’une grave crise énergétique sur le continent. D’ailleurs, des responsables de plusieurs pays du Golfe Persique, producteurs de pétrole, ont récemment jugé que « le pire reste à venir » pour l’Europe.
La réduction volontaire de la production de pétrole décidée par l’Arabie saoudite devrait être de l’ordre d’un million de barils par jour. Une baisse par conséquent importante qui s’appliquera dès le mois de juillet 2023. De plus, elle « pourra être étendue ». Voilà ce qu’a annoncé le prince saoudien Salmane ben Abdelaziz Al Saoud au cours d’une conférence de presse faisant suite à la réunion de l’OPEP. Ce dernier a également jugé que cette mesure allait « ramener la stabilité » sur un marché de l’or noir extrêmement volatil et plutôt morose actuellement. Salmane ben Abdelaziz Al Saoud est même allé jusqu’à qualifier cette décision de « cerise sur le gâteau » pour l’Arabie saoudite. Une formule équivoque.
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faire une simulationDes divergences d’opinions au sein de l’OPEP
Cette diminution de la production a été actée après plusieurs heures de négociations entre les pays membres de l’OPEP. Certains médias ont même évoqué des divergences d’opinions existant entre les 23 participants à ce sujet.
Avant le début de la rencontre viennoise, le risque d’un désaccord entre l’Arabie saoudite et la Russie était craint par certains :
- en effet, Moscou est réticent à l’idée de diminuer fortement sa production de pétrole. La raison : les sanctions occidentales décidées à la suite de l’attaque de l’Ukraine, justement financée par l’or noir. Ces sanctions ont eu pour conséquence que seul le pétrole russe fixé à un prix égal ou inférieur à 60 dollars le baril peut continuer à être livré. En conséquence, si les prix remontent, le Kremlin verra ses commandes diminuer et y perdra au change. C’est donc clair : la Russie ne profiterait pas d’un renchérissement des cours de cette énergie fossile ;
- néanmoins, de son côté, « L’Arabie saoudite a besoin de prix plus élevés pour équilibrer son budget ». C’est ce qu’a indiqué Barbara Lambrecht, de Commerzbank, la deuxième plus grande banque d’Allemagne. Pour cette dernière, un seuil de 80 dollars le baril serait davantage souhaité par Ryad.
Dans tous les cas, à la fin du sommet, le vice-premier ministre russe s’est voulu rassurant : « Nous n’avons pas eu de désaccord. C’est une décision commune faite dans l’intérêt du marché » a déclaré Alexander Novak.
De leur côté, les Émirats arabes unis souhaitaient pouvoir pomper davantage. Ils ont finalement obtenu un relèvement de la base de calcul de leur quota de production de brut. Cela a été accordé, selon l’agence de presse Bloomberg, malgré les réticences initiales de plusieurs pays :
- l’Angola ;
- le Congo ;
- le Nigeria.
En contrepartie, les objectifs de production de ces États, qu’ils atteignent difficilement, ont été abaissés pour l’an prochain.
C’est cependant l’opposition russo-saoudienne qui cristallisait les craintes. En mars 2020, pendant la dernière crise et baisse majeure des prix du marché, la Russie avait refusé de diminuer drastiquement sa production. En réaction, le royaume saoudien avait inondé le marché de pétrole, plombant son prix de manière durable. En 2023, « l’Arabie saoudite ne veut pas que ce scénario [ne] se reproduise, pas plus que la Russie », a estimé Yousef Alshammari. Ce dernier est un expert de CMarkits, spécialiste des marchés mondiaux de l’énergie.
Les conséquences possibles de cette baisse de la production de pétrole
Quid des répercussions de cette diminution de la production pétrolière, en particulier pour les consommateurs à la pompe ?
Il faut déjà savoir que cette décision saoudienne fait suite à une première baisse déjà instaurée depuis début mai 2023. Elle avait été actée par 9 pays membres de l’OPEP+, dont l’Arabie saoudite et la Russie. Celle-ci, se chiffrant à un total de 1,6 million de barils quotidiens, a été étendue « jusqu’à fin 2024 ». C’est ce qu’a souligné aux journalistes le vice-président russe, Alexander Novak.
Cette première coupe de la production de pétrole, annoncée de façon surprise début avril, avait été motivée par l’importante chute des cours, que l’on connaît. Toutefois, elle n’avait pas permis de faire remonter les prix. Le marché de l’or noir reste effectivement toujours en berne, marqué par :
- les craintes d’une récession économique mondiale ;
- les hausses des taux des principales banques centrales ;
- la reprise plutôt laborieuse de la demande en Chine à la suite de la fin des restrictions anti-covid.
Alors, quel sera l’effet réel de cette décision de baisse prise par l’Arabie saoudite le 4 juin dernier ? Les analystes estiment s’attendre à « une réaction positive du marché ». Pourtant, Tamas Varga, de PVM Energy, juge qu’« un repli de la demande sous la pression inflationniste pourrait annuler l’effet de cette réduction de l’offre ».
Dans ces circonstances, à quel impact faut-il s’attendre sur les prix à la pompe pour les automobilistes ? L’ensemble des consommateurs, français comme européens, ont déjà été durement impactés par l’augmentation des prix de l’énergie en 2022. Néanmoins, en avril, après la première baisse de production actée par l’OPEP, les cours n’étaient pas remontés. Par conséquent, il n’y avait pas eu de répercussion directe sur le prix de l’essence. Pour cette nouvelle coupe, ce n’est pas certain non plus.
Pour quelles raisons ? Plusieurs facteurs jouent en faveur des consommateurs :
- il y a en fait toujours un décalage dans le temps entre l’évolution du prix du baril et à la pompe ;
- la situation internationale fait que l’offre de pétrole reste encore actuellement supérieure à la demande.
Selon les experts, seule une chute forte et durable des quotas de production pourrait avoir un effet sur les prix. Nous n’y sommes donc pas encore, même si la situation demeure assez tendue. En fin d’année 2023, la COP 28 aura lieu à Dubaï, aux Émirats arabes unis. Son président a déjà annoncé début mai que, selon lui, un arrêt des énergies fossiles n’était pas prévu ni envisageable.
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