ADEME : nomination de Boris Ravignon rejetée par le Parlement !

Voilà un rejet totalement inédit : proposée par le président de la République, la nomination de Boris Ravignon comme nouveau dirigeant de l’ADEME n’aura finalement pas lieu. Celle-ci, le 12 avril 2023, a été refusée par le Parlement qui venait d’auditionner l’actuel maire (Les Républicains) de Charleville-Mézières, dans les Ardennes. C’est en réalité la première fois qu’un candidat proposé par le chef de l’État, à l’ADEME (Agence de la transition écologique) ou ailleurs, est refusé. Quelles en sont les raisons ? Pour quelles conséquences à venir ? Choisir.com revient sur une décision qui est également un sérieux camouflet pour Emmanuel Macron.

refus présidence ADEME

Le rejet de la nomination de Boris Ravignon à la tête de l’ADEME : une « première historique »

Boris Ravignon est, depuis 2014, le maire (Les Républicains) de la ville ardennaise de Charleville-Mézières. C’est sur lui que s’était porté le choix de l’Élysée pour devenir le nouveau dirigeant de l’ADEME, l’Agence de la transition écologique.

Toutefois, le Parlement ne l’a pas entendu ainsi. Le mercredi 12 avril 2023, celui-ci a donc rejeté cette nomination émanant d’Emmanuel Macron lui-même. C’est un refus notable puisqu’il est totalement inédit : c’est en effet la première fois qu’une nomination proposée par le président de la République est rejetée par le Parlement. Son aval est nécessaire depuis une nouvelle procédure introduite dans l’article 13 de la constitution en 2008.

Boris Ravignon ne sera donc pas le président de l’ADEME. Cette organisation, qui détient un budget d’environ 4 milliards d’euros, tient de multiples rôles majeurs en France :

  • elle participe à la mise en place des politiques publique en ce qui concerne le climat et l’énergie ;
  • elle conseille également les entreprises et les institutions pour leur transition écologique.

L’audition du maire de Charleville-Mézières a été réalisée par les députés et des sénateurs le mercredi 12 avril matin. Par la suite, un communiqué de l’Assemblée nationale a indiqué que « le président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans une commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés ».

Et c’est donc ce qui s’est produit. À l’issue de l’audition de Boris Ravignon par les commissions du développement durable du Sénat et de l’Assemblée nationale, celles-ci ont procédé au vote. Résultat : plus des trois cinquièmes des parlementaires de ces commissions ont effectivement voté contre sa nomination, dépassant de ce fait le quota requis par la constitution.

Dans le détail, 32 députés et sénateurs ont voté pour mais 57 ont voté contre, retoquant ainsi la nomination de Boris Ravignon. Totalement inédit, ce rejet forme donc une « première historique ».

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Les raisons du rejet de Boris Ravignon par le Parlement

Alors, la question se pose : quelles raisons ont motivé cette décision de la part des députés et des sénateurs ? Depuis le mois de juin 2022 et la démission d’Arnaud Leroy de son poste de président de l’ADEME, l’arrivée d’un successeur était attendue. En décembre 2022, Emmanuel Macron avait donc annoncé la nomination de Boris Ravignon à la tête de l’Agence de la transition écologique.

Dans un premier temps, la nomination de ce dernier, pour une période d’intérim, avait été actée le 14 décembre dernier. Toutefois, cela n’avait alors été validé que de justesse par les parlementaires. À ce moment, une majorité des votes exprimés avait été contre, mais sans atteindre les trois cinquièmes requis par la constitution pour s’opposer à la proposition de l’Élysée.

Désigner Boris Ravignon comme nouveau président de l’ADEME, c’était en fait, pour l’exécutif, faire un choix « Macron-compatible », d’après une formule du média Le Point. Il est vrai qu’en plus d’être des pro-nucléaires convaincus, les deux hommes se connaissent très bien :

  • ils sont tous deux énarques, de la même génération ;
  • ils ont travaillé ensemble à l’inspection générale des Finances à Bercy en 2004-2005 ;
  • en avril 2022, pendant la campagne présidentielle, Boris Ravignon avait préféré apporter son soutien au candidat Macron plutôt qu’à celui de son propre parti politique, Valérie Pécresse.

Est-ce pour ce lien particulier que Boris Ravignon avait alors été préféré, comme candidat pour prendre la tête de l’ADEME, à l’ancien ministre François de Rugy ? Dans tous les cas, deux éléments rendaient nécessaires, durant ce mois d’avril 2023, la confirmation du mandat de Boris Ravignon comme président de l’Agence pour une durée de cinq ans :

  • le renouvellement du conseil d’administration de l’ADEME le 14 février dernier ;
  • la fin officielle du mandat d’Arnaud Leroy.

On pourrait, à première vue, penser que le rejet du Parlement peut s’expliquer par un souhait de ne pas voir un « proche d’Emmanuel Macron » à la tête d’une institution aussi importante. Pourtant, la réelle cause de cette décision semble autre : la volonté de Boris Ravignon de cumuler plusieurs fonctions.

En effet, durant l’audition, les parlementaires ont reproché à ce dernier son refus de démissionner de son mandat de maire de Charleville-Mézières pour assurer sa charge de président de l’ADEME. Depuis sa première nomination de décembre 2022, Boris Ravignon avait, malgré tout, quitté son poste de conseiller régional du Grand-Est. Cependant, il est quand même resté également président de la Communauté d’agglomération de Charleville.

Une telle volonté de cumul a donc été désavouée, puis sanctionnée, par les commissionnaires. « On ne peut pas gérer une commune de 50 000 habitants – on sait combien les administrés ont besoin de leur maire en ces moments de crise – et de l’ADEME. Il faut choisir ! » a fait savoir Emmanuel Blairy, réputé (RN) du Pas-de-Calais.

De son côté, Boris Ravignon a tenté de mettre en avant « l’intérêt de rester en contact avec le terrain » pour remplir au mieux sa nouvelle mission. Il a également rappelé que le cumul était « légal » et que c’était « déjà arrivé dans le passé ». Sans succès donc.

Un désaveu adressé à Emmanuel Macron

Quelles que soient les vraies raisons qui ont motivé la décision des députés et des sénateurs, un fait est incontestable : leur refus d’accepter la nomination de Boris Ravignon forme un désaveu (inattendu) adressé directement au chef de l’État. De plus, ce camouflet intervient dans un contexte où l’exécutif est déjà fragilisé par les fortes contestations sociales liées à sa réforme des retraites.

Après le vote, la commission sénatoriale a aussi signifié son agacement devant le fait d’avoir dû réentendre Boris Ravignon une deuxième fois alors que cela avait déjà été réalisé il y a quatre mois à peine. Dans un communiqué, les sénateurs ont ainsi fait savoir que « ce vote traduit le mécontentement du Parlement devant une telle impréparation, nouvelle manifestation du manque de considération de l’exécutif à son égard ».

Quant à Boris Ravignon, ce dernier n’a pas tardé à faire connaître son amertume vis-à-vis de la décision qui a été prise à son encontre : « J’ai le sentiment d’être tombé dans un traquenard politique, d’être tombé dans un règlement de compte politique ». Le maire de Charleville-Mézières a aussi indiqué qu’il pensait pouvoir être « un meilleur président de l’ADEME en gardant un pied dans la vie publique locale parce qu’aujourd’hui, on attend beaucoup des collectivités dans la transition écologique, c’est donc bien d’être à la fois au niveau national et au niveau local pour voir comment les choses se passent ».

Conséquence de ce rejet par le Parlement : le chef de l’État doit maintenant chercher un nouveau candidat pour diriger l’ADEME. En ce sens, Boris Ravignon a également déclaré qu’il « souhaite à l’ADEME d’avoir rapidement une gouvernance fonctionnelle qui puisse lui permettre de travailler […] pour relever les défis écologiques qui sont ceux de notre pays et du monde ». Parmi ceux-ci, le développement des énergies renouvelables, domaine dans lequel la France est (encore) très en retard par rapport à ses voisins européens.

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