Sortir des fossiles, une « fantaisie » pour les géants du pétrole
Réunies mi-mars 2024 au cours d’une des plus importantes conférences mondiales sur l’énergie, les grandes entreprises multinationales pétrolières ont affiché leur optimisme pour l’avenir. Selon elles, la transition énergétique actuelle est un « échec » et la sortie des fossiles une « fantaisie » qu’il faut abandonner. Avec une demande de pétrole qui, au contraire de l’avis de spécialistes, devrait encore fortement croître dans le futur.
À la CERAWeek de Houston, le pétrole est roi
La CERAWeek de Houston, dans l’État du Texas aux États-Unis, est l’une des principales conférences sur l’énergie de la planète. Aux yeux de certains, elle forme une espèce de « Super Bowl du monde énergétique ». Organisée par la société américaine S&P Global, elle rassemble de multiples acteurs du secteur, entre entreprises, cadres supérieurs, ministres de l’Énergie… Au total, ce sont plus de 7 000 personnes qui y participent chaque année.
L’édition 2024 s’est tenue le 18 mars 2024 dans la métropole texane. Ses têtes d’affiche : les PDG des plus grandes firmes pétrolières internationales. Étaient en effet notamment représentées :
- Petronas ;
- Shell ;
- ExxonMobil ;
- Aramco ;
- TotalEnergies.
À écouter ces derniers, le monde est en réalité à des années-lumière de la fin du pétrole, pourtant annoncée d’ici 2030 par l’AIE, l’Agence internationale de l’énergie. La raison motivant cet avis est l’état actuel de la demande en énergie comme de la consommation. À leurs yeux, celles-ci n’ont jamais été aussi élevées. D’après des projections réalisées par des centres de données, elles devraient d’ailleurs continuer à croître de façon très régulière. Pour le président-directeur général de la société saoudienne Aramco, Amin H. Nasser, cette croissance constante de la demande en hydrocarbures devrait durer jusqu’en 2045 au moins. « C’est loin d’être l’avenir que certains espéraient », a déclaré celui-ci de manière légèrement provocatrice.
Amin H. Nasser ne s’est d’ailleurs pas arrêté là, en affirmant que « la stratégie actuelle de transition [énergétique] est un échec apparent sur la plupart des fronts ». Il regrette que, dans notre contexte de réchauffement climatique, son industrie ait été vue par certains comme « l’ennemi absolu ». Il en a aussi profité pour déclamer plusieurs de ses vérités. Celles-ci donnent à la neutralité carbone, désirée par tant d’écologistes, l’allure d’un vague point présent dans un horizon seulement très lointain. D’après lui :
- la demande internationale en pétrole devrait battre des records en 2024 ;
- la baisse des émissions de gaz à effet de serre (GES) grâce aux énergies renouvelables n’est que marginale. Et ce, malgré 9 500 milliards de dollars (soit 8 740 milliards d’euros) d’investissement dans ce domaine en vingt ans. Pour le PDG saoudien, cette réduction des émissions, comme en Europe, tiendrait davantage au basculement de plus en plus important du charbon au gaz naturel ;
- sans l’existence de subventions, les véhicules favorisant la mobilité électrique seraient 50 % plus chers que les voitures thermiques.
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faire une simulationLa sortie du pétrole et du gaz, une « fantaisie » à abandonner pour les géants pétroliers
Finalement, aux yeux d’Amin H. Nasser, la transition énergétique n’est qu’un « irritant croissant pour le Sud global », réunissant les pays en développement de la planète. Avec quelques chiffres à l’appui :
- aux États-Unis, la population consomme en moyenne 22 barils de pétrole par an et par personne ;
- en Europe, c’est 9 barils par an et par personne ;
- au niveau mondial, ce chiffre tombe à 1,2 baril pour 85 % de la population.
Autant de données expliquant pourquoi, selon lui, « nous devons abandonner la fantaisie de sortir du pétrole et du gaz ». Une déclaration lancée sous les applaudissements généraux des géants planétaires des hydrocarbures.
Le son de cloche était identique, lors de ce sommet surnommé le « Davos » du pétrole, du côté de Darren Woods, PDG d’ExxonMobil. Pour lui, « on n’est pas sur le chemin d’avoir zéro émission d’ici 2050 », a-t-il martelé. Pour quelle raison ? De son point de vue, si une volonté réelle existe pour diminuer les émissions, au moment d’agir concrètement, « personne ne veut en payer le prix ».
Les géants pétroliers soulèvent donc la question de l’abordabilité de cette transition comme de son coût qui, à les entendre, retomberait forcément sur le consommateur. Représentant ainsi un frein de taille à la réalisation efficace de la neutralité carbone. Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies, s’est même permis une petite mise en garde à destination des gouvernements. À vouloir aller trop vite et décider de nouvelles réglementations dont « les gens ne veulent pas, […] vous courrez le risque de devoir reculer ». Autrement dit, dans ce cas, les électeurs « voteront pour d’autres personnes ». À l’en croire, les populations ne souhaitent pas de changement et n’accepteraient pas de supporter une part juste du poids de la transition écologique. La mettre en place « trop intensément » serait donc synonyme de risque électoral pour les dirigeants politiques. Ces propos ne chercheraient-ils pas surtout à faire pression sur les États pour que les géants de l’hydrocarbure puissent continuer à produire avec un maximum de liberté ?
Une activité pétrolière en expansion et… contraire aux engagements internationaux
En tout cas, ces positions et ces déclarations vont à l’encontre du texte final de la COP28 de Dubaï, appelant à une « transition hors des énergies fossiles ». Le souhait des firmes pétrolières américaines et mondiales est avant tout d’exploiter l’or noir autant qu’ils le peuvent. Voilà pourquoi elles se lancent dans de multiples acquisitions et investissements. Par exemple :
- au Texas, ExxonMobil investit dans le gaz de schiste en procédant au rachat de l’entreprise Pioneer pour 60 milliards de dollars ;
- l’exploitation de gisements au large du Guyana, en Amérique du Sud, fait l’objet d’un différend opposant ExxonMobil et Chevron ;
- en juin 2023, la compagnie anglo-néerlandaise Shell avait déjà annoncé stabiliser sa production de pétrole… au lieu de la réduire comme prévu à la base.
Au cours du CERAWeek de Houston, des doutes ont aussi été émis au sujet des technologies de capture de carbone, spécialement pour des secteurs où le dioxyde de carbone est moins concentré. Selon Darren Woods, elles n’en sont qu’à « des stades préliminaires […] Je suis optimiste, mais je ne suis pas persuadé qu’elles réussiront ». À ses yeux, cette technologie, comme la production d’hydrogène, nécessite la mise en place de subventions gouvernementales pour être viable. Sans elles, elles ne pourraient pas être de véritables alternatives crédibles.
Pourtant, à l’opposé de la vision des géants du pétrole, d’autres discours se sont fait entendre aux « Oscars de l’énergie ». Y était en effet présente la secrétaire américaine du secteur, Jennifer Granholm. Celle-ci juge que « l’impulsion pour une transition énergétique propre est indéniable » et que « les consommateurs demandent un changement ». Elle a enfin ajouté à ses interlocuteurs que « nous tous, dans cette pièce, avons le pouvoir de gérer cette transition de manière responsable et urgente ». Les PDG des grandes multinationales du pétrole ne semblent pas l’entendre de cette oreille.
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