Énergie : la loi de relance du nucléaire définitivement adoptée

Le 16 mai 2023, le Parlement a adopté de façon définitive une loi phare portée par l’exécutif et la volonté présidentielle. L’objet de celle-ci : la relance et l’accélération du nucléaire dans notre pays. Après le vote du Sénat, c’est l’Assemblée nationale qui a entériné ce projet de loi porté par le gouvernement. Cela va lancer un plan industriel d’une ampleur inédite en France depuis la vague de construction du parc nucléaire à la fin des années 1970. L’objectif : permettre à terme la sortie de terre de 14 réacteurs nucléaires, dont 6 à l’horizon 2035. Choisir.com vous détaille ce que prévoit cette loi qui, cependant, n’a pas fait que des heureux.

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Un vote largement en faveur du nucléaire à l’Assemblée nationale

Avec la réunion de l’« Alliance du nucléaire » à Paris le matin même, ce fut décidément une belle journée pour l’énergie atomique en France. Le mardi 16 mai dernier, le projet de loi de relance et d’accélération du nucléaire a définitivement été adopté par le Parlement.

Après avoir d’abord été effectué par le Sénat une semaine auparavant, c’est l’Assemblée nationale qui a procédé au vote de cette loi. Le texte, qui a pour but de faciliter et d’accélérer la construction de nouveaux réacteurs EPR (European Pressurized Reactor), a été assez facilement adopté. En effet, il a récolté 399 votes « pour » contre 100 voix « contre ». Cette large adhésion a été rendue possible par une coalition du camp macroniste ainsi que de députés :

  • Les Républicains (LR) ;
  • Rassemblement National (RN) ;
  • Communistes (PC).

Seuls les groupes écologiste (EELV) et de la France Insoumise (LFI) ont voté contre. Au cours des débats, ils ont bien tenté de trouver des arguments pour convaincre leurs collègues députés de s’opposer à ce texte. Ils ont notamment insisté sur :

Au moment de la première lecture, le parti socialiste (PS) s’était également opposé au texte. Néanmoins, lors du vote, le groupe a finalement décidé de s’abstenir, décrivant le nucléaire comme une « énergie de transition » vers les énergies renouvelables (EnR).

Trois mois après l’adoption du projet de loi pour l’accélération de ces EnR, c’est à nouveau un grand succès pour Agnès Pannier-Runacher. La ministre de la Transition énergétique a affirmé qu’il s’agit d’un « texte majeur » pour « produire une énergie indépendante, compétitive et décarbonée ». Elle a aussi souhaité que se mette en place en France un « consensus politique » au sujet de la question énergétique. Pour que la loi soit concrètement appliquée, il ne reste désormais plus qu’une seule étape à venir : sa promulgation par le président de la République. Cela ne saurait tarder.

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Ce que prévoit cette loi de relance du nucléaire : 6 nouveaux EPR2 en 2035 ?

La nouvelle loi est avant tout technique. Elle vise à accélérer les procédures, en matière d’urbanisme notamment, pour simplifier les futures démarches. Le but évident est de concrétiser la volonté présidentielle. À plusieurs reprises, Emmanuel Macron a effectivement indiqué vouloir :

  • bâtir 6 nouveaux réacteurs nouvelle génération, les EPR2. Il s’agit de réacteurs à eau pressurisés. L’objectif est de les mettre en service à l’horizon 2035 ;
  • lancer également des études pour 8 EPR2 supplémentaires.

Au niveau des 6 réacteurs déjà actés, ils s’implanteront sur des sites de centrales nucléaires existants, ou à proximité. Il devrait y en avoir :

  • deux à Penly où les travaux préparatoires devraient être lancés dès 2024. Toutefois, à la place d’une livraison en 2035, le média Midi Libre pense qu’il faut plutôt s’attendre à une mise en service pour 2037 ;
  • deux à Gravelines, dans le Nord ;
  • les deux derniers devraient peut-être sortir de terre à Tricastin, dans la Drôme, même si cela n’est pas encore officiellement validé.

Autre grand changement introduit par ce texte : le fait qu’il revienne, en grande partie, sur la loi sur la transition énergétique de 2015, sous François Hollande. En effet, les parlementaires ont acté la suppression des objectifs qui avaient été votés en 2015. Ceux-ci prévoyaient une réduction :

  • à 50 % de la part de l’énergie nucléaire dans le mix énergétique français en 2035. La date initialement fixée était même 2025, avant qu’un délai de 10 années supplémentaires ne soit ensuite accordé ;
  • du plafond de 63,2 gigawatts (GW) de capacité totale de production nucléaire autorisée en France.

Inutile de préciser que ce bouleversement profond provoqué par le texte mécontente tous les opposants au nucléaire. Beaucoup n’ont pas non plus apprécié une dernière mesure que prévoit la loi. Celle-ci a en effet décidé du durcissement des sanctions en cas d’intrusion dans les centrales. La peine prévue a été portée de :

  • 1 an à 2 ans ;
  • 15 000 à 30 000 euros d’amende ;
  • en plus, le texte introduit aussi la « possibilité pour le juge pénal de priver d’aides publiques des associations qui enfreindraient » la loi.

Par contre, les parlementaires n’ont pas accédé à la volonté gouvernementale de réformer le système français de la sûreté nucléaire. L’exécutif avait, en effet, l’ambition de fondre :

Ces deux institutions demeureront donc bien indépendantes. Cependant, en commission mixte paritaire, un amendement visant à empêcher toute fusion future a été enlevé. La volonté d’union de l’IRSN et de l’ASN n’est donc peut-être que reportée.

Une loi qui ne fait pas l’unanimité

Dès le 9 mai, après le vote positif réalisé par le Sénat, Agnès Pannier-Runacher avait clamé sa satisfaction. Elle avait indiqué que « voter définitivement ce texte, c’est permettre à notre pays de réaliser une grande avancée écologique en mobilisant tous les leviers de décarbonation pour lutter contre le dérèglement climatique ».

Néanmoins, malgré sa large adoption, de nombreuses voix critiques n’ont pas tardé à s’élever pour signifier leur mécontentement. Les opposants à cette loi et au nucléaire protestent et regrettent que ce texte ait été voté avant la loi de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Celle-ci ne devrait pas être discutée avant, au moins, l’été 2023. « Tout a été fait dans le désordre […], selon le député insoumis Maxime Laisney. Seule cette loi de programmation pourrait décider de la relance ou non du nucléaire ».

Pour l’ONG Greenpeace et le réseau Sortir du nucléaire, « le gouvernement met la charrue avant les bœufs et acte une relance à marche forcée ». Les Insoumis et les Verts ont d’ores et déjà promis de déposer un recours devant le Conseil constitutionnel. Ces deux partis prônent une sortie du nucléaire en 2045, en faveur des énergies renouvelables. Cependant, sont-ils déjà trop à contre-courant ? En effet, en plus de cette loi qui est désormais adoptée, l’opinion publique française se montre de plus en plus favorable à l’énergie atomique.

La député écologiste Julie Laernoes a malgré tout dénoncé le « matraquage effréné pour faire oublier à la population les dangers du nucléaire et ses déboires technologiques et financiers ». Il est vrai que tous les problèmes du parc nucléaire en 2022 avaient provoqué l’arrêt forcé de nombreux réacteurs. Cette immobilisation prolongée avait été l’une des causes de la crise énergétique qui a frappé la France l’an passé.

Au contraire, la député Renaissance Maud Bregeon juge qu’« il ne faut plus avoir le nucléaire honteux ». Celle-ci, rapporteur du projet de loi, est aussi… une ancienne salariée d’EDF. Les députés républicains, même s’ils ont soutenu le texte, n’ont pas manqué de critiquer le « tête-à-queue spectaculaire » opéré par Emmanuel Macron sur le sujet. En 2017, lors de sa première campagne présidentielle, le président avait promis de « garder le cadre » de la loi sur la transition énergétique de 2015. Promesse qu’il n’a donc pas respectée…

Le texte est en tout cas voté dans un contexte où le rapport parlementaire accablant sur la politique énergétique française est encore dans les mémoires. Ses deux auteurs, Raphaël Schellenberger (LR) et Antoine Armand (Renaissance) sont ouvertement pro-nucléaires.

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