Transition écologique : une « économie de guerre » nécessaire ?
« La crise climatique […] est notre horizon, notre mur, notre soleil noir ». Voilà ce qu’a déclaré, le 9 juin 2023, François Ruffin. Dans une interview accordée au média écologiste Vert, le député de La France insoumise (LFI) s’est exprimé, comme d’habitude, sans la moindre langue de bois. Pour autant, selon lui, l’issue n’est pas irrémédiable et la réalisation d’une transition écologique efficace est possible. Dans ce but, ce dernier souhaiterait que l’État mette en œuvre ce qu’il appelle une « économie de guerre climatique ». Quels sont, d’après François Ruffin, les leviers essentiels à actionner qui pourraient permettre de combattre le dérèglement climatique et décarboner l’économie ? Comment trouver les moyens de financer l’ensemble de ces objectifs ? Choisir.com vous résume ses propos.
Répondre à la crise du climat par une « économie de guerre climatique »
C’est un long entretien avec François Ruffin que le média écologiste Vert a publié le vendredi 9 juin dernier. Parmi les sujets évoqués par le député La France insoumise (LFI)-NUPES de la Somme, le dérèglement climatique actuel a pris une large place. Pour lui, c’est « l’enjeu majeur » de notre société. « La crise climatique […] est notre horizon, notre mur, notre soleil noir », a déclaré François Ruffin.
C’est pourquoi ce dernier appelle à mettre les capitaux, les compétences et le travail au service d’une bifurcation de la société menant à une transition écologique juste et efficace. « Nous devons diriger les capitaux, la main-d’œuvre, les savoir-faire vers l’économie de guerre climatique », a-t-il fait savoir.
Pourquoi le député parle-t-il d’économie de guerre pour évoquer la lutte nécessaire en faveur du climat ? François Ruffin prend l’image de Franklin Delano Roosevelt, président des États-Unis durant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). En 1941, celui-ci a lancé une gigantesque économie de guerre pour lancer son pays vers la victoire dans le conflit. « C’est pareil aujourd’hui pour le réchauffement » climatique, selon le député LFI. Alors que beaucoup pensent que, de toute façon, il est trop tard, lui assène le contraire. Des mesures fortes peuvent permettre à la France de renverser la donne et de parvenir à réduire ses émissions de gaz à effet de serre.
À ses yeux, « il faut commencer par le dossier du logement ». Il souhaite que « des dizaines de milliards d’euros » soient investis « dans la rénovation thermique » des habitations. Plus précisément, François Ruffin juge que :
- l’État « doit diriger 10 à 20 milliards d’euros par an » pour régler le problème des passoires thermiques ;
- « il faut multiplier la vitesse [de rénovation] par dix, par cent ».
En effet, la France fait face à une grave crise du logement et compte aujourd’hui 5 millions de passoires thermiques. Avec 2 500 rénovations par an actuellement, « il nous faudrait 2 000 ans à ce rythme pour rénover tous les logements », regrette le député de la Somme.
C’est pour permettre l’accélération de ces rénovations que la Première ministre Élisabeth Borne a récemment fait la promesse de simplifier MaPrimeRénov’. Ce dispositif, qui doit aider au financement de ce type de travaux de rénovation énergétique, se transforme souvent en galère pour les particuliers.
En tout cas, pour François Ruffin, ces rénovations « ne sont pas des dépenses, c’est de l’investissement ». Pour quelles raisons ? Car leurs bénéfices seraient nombreux :
- la réduction des gaz à effet de serre, bien sûr ;
- la baisse des factures énergétiques, encore très élevées en 2023 ;
- l’amélioration de la santé de la population ;
- le renforcement de l’indépendance et de la souveraineté énergétique française.
Ce dernier point est « un enjeu majeur » depuis le début de la guerre en Ukraine, en février 2022, qui a déclenché la crise énergétique européenne. Pour combattre cette crise du logement, l’Insoumis souhaite également « encadrer les loyers, encadrer les prix du foncier ».
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faire une simulationLes autres leviers essentiels pour décarboner l’économie
François Ruffin en a profité pour délivrer une vision très critique de la planification écologique lancée en 2022 par Emmanuel Macron et le gouvernement Borne. Pour lui, c’est simple, « il n’y a pas de planification écologique aujourd’hui ». Il juge qu’il s’agit « d’un mot, pas [d’] une réalité ».
Selon le député, la décarbonation de l’économie doit s’accompagner d’une nécessaire réindustrialisation de la France. « C’est presque la mère de mes batailles », a-t-il d’ailleurs confessé. L’Insoumis réclame donc que le gouvernement mette en place une réelle « cohérence entre la politique industrielle et la politique commerciale ». Comme il le fait remarquer, « pourquoi produit-on des batteries pour les voitures électriques en laissant tomber les fonderies en aluminium ? ». La désindustrialisation est effectivement un problème qui risque de sérieusement impacter les capacités françaises de se tourner vers des énergies plus vertueuses. Pour tenter d’y remédier, Emmanuel Macron a dernièrement présenté le projet de loi industrie verte. François Ruffin souhaite un interventionnisme plus important de l’État et du gouvernement tout en critiquant la « pensée libérale » du président de la République.
Pour parvenir à décarboner l’économie, il faut aussi de la main-d’œuvre, fait remarquer le député. Ce dernier désire qu’il y ait plus de vocations dans les métiers du bâtiment. Élément essentiel pour cela : « donner une fierté à tous ces jeunes » qui pourraient être amenés à travailler, ou travaillent déjà, dans ce secteur.
Autre aspect fondamental pour faire « concilier fin du mois et fin du monde », il faut que le travail paie. Selon François Ruffin, on ne peut pas attirer une main-d’œuvre nombreuse et résoudre la crise écologique sans cela. C’est pourquoi il propose l’indexation des salaires sur l’inflation qui a gravement impacté la qualité de vie des Français depuis l’an dernier. C’est « quelque chose qui a existé jusqu’en 1982 », précise le député. Concernant le problème de la cherté des produits alimentaires, ce dernier estime qu’un « blocage des prix sur un temps court paraît nécessaire ».
En plus de la réindustrialisation de la France et de la création d’une main-d’œuvre formée, compétente et bien rémunérée, un dernier levier est évidemment essentiel. Pour que cette transition écologique et climatique puisse se faire, « il faut canaliser toute la recherche, toutes les intelligences, vers les énergies renouvelables ». Le défi de leur déploiement est d’ailleurs énorme lorsque l’on sait que, d’ici 2035, la consommation électrique en France va augmenter plus fortement que prévu. Le solaire et l’éolien terrestres sont les deux secteurs sur lesquels le développement de la production renouvelable se base dans le pays. François Ruffin a néanmoins aussi abordé le cas des éoliennes en mer flottantes, comme il existe des fermes solaires en pleine mer. Ces technologies n’en sont qu’à un stade expérimental, mais pourquoi ne pas y voir des sources d’énergie d’avenir ?
Le député LFI-NUPES a évidemment été interrogé à propos de l’énergie nucléaire, vis-à-vis de laquelle il est plutôt opposé. Il conçoit qu’il soit « difficile de faire admettre qu’on va à la fois sortir des énergies fossiles et du nucléaire ». Selon lui, à ce sujet (comme sur tous les autres), « c’est au peuple français d’en débattre, de trancher », comme dans toute démocratie digne de ce nom. Cependant, « il ne faut pas que la place du nucléaire dans le mix énergétique nous empêche d’être à la pointe sur les énergies renouvelables ». D’autant plus que, dans ce domaine, la France était encore loin du compte en 2022.
Comment financer la transition écologique et climatique ?
C’est une question épineuse : comment financer toutes les mesures nécessaires à la transition climatique ? Celles-ci ont été estimées entre 25 et 34 milliards d’euros par an…
Selon François Ruffin, c’est clair : « il y a besoin d’un impôt sur la fortune climatique ».
La logique qui motive cette volonté est simple. Il faudra bien trouver l’argent nécessaire pour lutter contre la crise climatique. Sauf que « si on demande des efforts et que le sentiment c’est que, nous les gens, on doit tout porter et qu’en haut ils y échappent, ça ne va pas ». Cet impôt sur la fortune climatique serait d’autant plus logique que, de son point de vue, « les dividendes du CAC40 n’ont jamais été aussi élevés ».
Certains pourraient penser que, pour trouver de quoi financer la transition écologique, il faut augmenter les richesses, donc doper la croissance. François Ruffin n’est pas de ceux-là. « Je suis convaincu qu’il ne peut pas y avoir une croissance infinie sur une planète finie, confie-t-il. Il faut poser des limites ». De son point de vue, la course à la croissance a même des effets négatifs et cause « une dégradation des conditions de vie ». Le député de la Somme regrette effectivement une chose. Depuis les années 1970, la richesse « continue à augmenter ». Toutefois, « il n’y a plus aucune corrélation avec les indices de bien-être », comme l’espérance de vie, le taux de mortalité infantile… C’est pourquoi, à ses yeux, la poursuite de la croissance à tout prix ne doit pas être une fin en soi. François Ruffin est d’ailleurs partisan de ce qu’il nomme « l’a-croissance ». Il compare en réalité la croissance à un gâteau et critique le fait que certains souhaitent le faire grossir pour que chacun ait sa part. Selon lui, « le gâteau est déjà assez gros aujourd’hui, mais il faut mieux le répartir ».
Enfin, François Ruffin a été interrogé à propos de la dette. La France doit-elle s’endetter pour parvenir à financer cette transition énergétique et écologique ? Pour le député insoumis, la réponse est claire. « Si on s’endette pour rénover les logements, c’est pour moins dépenser demain ». Par conséquent, de son point de vue, cette solution est à envisager, car « c’est de l’investissement ». Selon lui, laisser à nos enfants un monde viable, avec de l’eau potable, de la nourriture et des températures supportables doit l’emporter sur la dette. Il ne doit pas être le seul à penser de cette manière.
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