Consommation électrique : une hausse importante d’ici 2035 !

Les Français auront-ils assez d’électricité pour satisfaire tous leurs besoins en 2035 ? Cette question, qui peut paraître saugrenue, est pourtant bel et bien d’actualité. Le 7 juin 2023, la RTE, gestionnaire du réseau de transport de l’électricité, a tiré la sonnette d’alarme. Les conclusions de son dernier rapport, qui réalise une estimation de la consommation électrique nationale d’ici douze ans, sont sans appel. Cette consommation d’électricité va connaître une hausse bien plus importante que prévu lors de la prochaine décennie. Pour quelles raisons ? Qu’est-ce qui la provoque ? Ce qui est certain, c’est que pour pouvoir répondre à ce besoin croissant de la population française, la production électrique va devoir suivre une dynamique semblable. Le cap fixé par RTE : doubler la production d’énergies renouvelables pour 2035, principal levier pour mettre en adéquation consommation et production nationales. Choisir.com revient sur ce défi majeur pour l’avenir énergétique français qui est loin d’être gagné.

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Hausse de la consommation : y aura-t-il assez d’électricité pour tous les Français en 2035 ?

RTE est le gestionnaire du réseau de transport d’électricité en France. Le mercredi 7 juin dernier, il a publié de nouvelles projections au sujet de l’évolution de la consommation électrique dans le pays.

Cette étude, intitulée « Comprendre et piloter l’électrification d’ici 2035 », est en fait une analyse prospective de la consommation française sur les douze prochaines années. Il s’agit d’une actualisation de ses estimations réalisées en octobre 2021, se trouvant dans un rapport baptisé « Futurs énergétiques 2050 ». Son but : éclairer le débat public avant l’élaboration de la stratégie énergétique française par le gouvernement.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette actualisation était plutôt nécessaire. Ses conclusions sont effectivement sans appel. Elles indiquent que la consommation d’électricité va augmenter plus rapidement que prévu jusqu’en 2035.

Pourquoi s’attendre à une augmentation plus importante de la consommation électrique pour 2035 ?

Quelles raisons ont amené RTE à revoir ainsi ses estimations à la hausse ? Quels éléments peuvent expliquer que la consommation électrique nationale va à ce point augmenter ? Le nouveau rapport intègre en fait les deux bouleversements majeurs, intervenus depuis 2021 et qui ont réellement changé la donne depuis un an et demi :

  • la publication du programme européen « Fit for 55 » qui a renforcé les exigences en termes de décarbonation de l’économie à l’échelle de l’Union européenne. La France devra ainsi tenir ces nouveaux objectifs climatiques ;
  • la guerre en Ukraine, déclenchée en février 2022. Ce conflit a été l’une des causes qui a provoqué une crise énergétique sans précédent en Europe l’an passé. Il a aussi mis en évidence la nécessité de mettre en place sur le continent des politiques de souveraineté énergétique et de relocalisation de l’industrie.

La réindustrialisation de la France est donc l’un des enjeux qui vont expliquer ce besoin accru en électricité. En mai dernier, Emmanuel Macron a d’ailleurs dévoilé le projet de loi industrie verte. Les nouvelles usines qui doivent être créées auront un besoin urgent et massif d’électricité pour remplacer les productions réalisées grâce au gaz et au charbon.

Autre raison qui explique cette estimation en hausse de la consommation française : le dérèglement climatique, qui est une réalité. RTE a ainsi fait remarquer que « les Français sont conscients qu’un changement des modes de vie est nécessaire ». Cette évolution peut aussi avoir comme bénéfice de faire baisser leurs factures énergétiques, qui restent encore élevées en 2023. Si vous souhaitez alléger vos factures de gaz et/ou d’électricité, vous pensez d’ailleurs aussi peut-être à changer de fournisseur. Pour cela, n’hésitez pas à vous rendre sur le Comparateur Énergie de Choisir.com, il vous sera très utile.

Enfin, RTE juge que les besoins en électricité vont aussi augmenter au quotidien pour la population, comme pour les voitures électriques notamment.

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Une hausse massive de la consommation électrique attendue

C’est l’élément central du rapport publié par RTE le 7 juin : la consommation d’électricité va augmenter d’ici 2035, et dans des proportions bien plus importantes que l’on estimait auparavant. C’est ce constat qui nous impose la formulation de cette question : y aura-t-il assez d’électricité pour les besoins de tous les Français à l’horizon 2035 ?

En 2022, la population française a consommé 460 térawattheures (TWh) d’électricité. Pour 2035, les estimations actuelles prévoient :

  • une consommation annuelle comprise entre 580 et 640 TWh ;
  • en 2021, RTE tablait encore sur un scénario de consommation annuelle allant de 540 à 585 TWh au maximum.

La hausse attendue est donc effectivement conséquente et massive. RTE estime que, pendant la décennie 2025-2035, la croissance annuelle de la consommation électrique française devrait se porter au-dessus des 10 TWh. Le gestionnaire du réseau fait remarquer que ce rythme « n’a plus été atteint depuis les années 1980 ». Ce point « met en évidence l’ampleur du défi auquel le système électrique est confronté », précise RTE.

C’est donc un défi de taille face aux enjeux de la crise climatique qui rend indispensable le respect des engagements pris à l’échelle de l’Union européenne. Pour tenir ces objectifs, la France va devoir :

  • réduire davantage ses émissions de gaz à effet de serre, à -55 % par rapport à 1990. Ils étaient initialement établis à -40 % ;
  • tourner le dos plus rapidement que prévu aux énergies fossiles ;
  • augmenter d’autant sa production d’électricité verte et bas carbone.

Le défi : doubler la production d’énergies renouvelables d’ici 2035 pour répondre aux besoins de la population française

C’est d’une logique implacable : pour répondre aux besoins des Français en électricité qui vont augmenter massivement, la production électrique devra connaître une dynamique similaire. Face aux difficultés du secteur nucléaire depuis 2022, le levier principal à actionner pour atteindre cet objectif est celui des énergies renouvelables.

Les énergies renouvelables, « les seuls vecteurs permettant d’électrifier de façon accélérée » la France

Xavier Piechaczyk, président de RTE, s’est montré très clair en commentant le rapport publié le 7 juin dernier. Pour lui, il n’y a pas foule de solutions pour faire face à cette hausse de la consommation électrique attendue. La France se trouve donc devant l’obligation de produire « plus de renouvelables, et plus vite, dans les prochaines années ».

Selon lui, le recours aux énergies vertes n’est pas simplement une possibilité, mais un impératif. « Nous sommes à un moment où l’éolien et le solaire sont les seuls vecteurs permettant d’électrifier de façon accélérée » le pays.

Dans ce domaine de la production d’énergies renouvelables (EnR), la France :

  • atteint aujourd’hui environ 120 TWh d’électricité produite à l’année ;
  • vise, pour 2035, une production minimum de 250 TWh.

Le calcul est simple : l’objectif français est donc de doubler sa production actuelle. Il s’agit ici d’un véritable défi lorsque l’on sait que notre pays, au niveau de la production d’énergies renouvelables, est encore loin du compte. Toutefois, Xavier Piechaczyk a souligné que ce niveau restait inférieur à ce que fait l’Allemagne, souvent présentée comme un modèle dans le domaine des EnR. Outre-Rhin, la fin officielle du nucléaire a d’ailleurs été actée très récemment. Le patron de RTE appelle aussi notre pays à imiter les « meilleures pratiques » des pays européens concernant les politiques sur les renouvelables, notamment la Suède.

Pour Thomas Veyrenc, directeur exécutif de RTE, « il y a urgence à déployer l’éolien terrestre et le solaire qui peuvent être mis en œuvre dans des délais courts ». Ce dernier juge également que « viser moins de 250 TWh de renouvelables en 2035, ce serait prendre un gros risque sur la trajectoire [climatique] à moyen terme ».

Qu’on ne se trompe donc pas sur la nature du rapport de RTE : celui-ci tire la sonnette d’alarme énergétique du pays. Il note également que « d’ici 2030, l’accroissement des renouvelables passera essentiellement par l’éolien terrestre et le solaire ».

Dès cette date, l’éolien offshore pourra apporter son concours à la production nationale. Toutefois, cela pourra se faire seulement « sous réserve que la France parvienne à attribuer massivement des parcs entre aujourd’hui et 2025 ». EDF a récemment décroché un appel d’offres XXL pour un parc en Normandie qui ouvrira en 2031. La France travaille également avec d’autres pays européens pour développer l’éolien offshore en mer du Nord.

Le nucléaire, un simple « relais » des renouvelables, et seulement à partir de 2035

Quid de l’énergie nucléaire, pilier du mix énergétique français jusqu’à il n’y a pas si longtemps ? Pour Xavier Piechaczyk, ce secteur ne pourra servir que de « relais », une fois les objectifs d’électrification atteints en 2035.

La France mène pourtant une politique largement volontariste pour développer le nucléaire dans notre pays comme en Europe. Une loi de relance du nucléaire a d’ailleurs été adoptée en mai dernier. Celle-ci prévoit la construction de nouveaux réacteurs dernière génération, les EPR2. Le problème ? Les premiers d’entre eux ne sortiront pas de terre avant 2035… au minimum.

RTE estime que ces nouveaux EPR2 pourront « permettre de poursuivre la croissance de la production » bas carbone, mais seulement à compter de 2035. Grâce à des actions de « maximisation » du parc actuel, RTE pense, dans une prévision « prudente », que la production nucléaire annuelle moyenne peut atteindre d’ici 2035 360 à 400 TWh. La difficulté : les 56 réacteurs qui composent le parc national sont loin de tous tourner à 100 % depuis 2022. Certains d’entre eux font encore face, en 2023, à des problèmes de fissures et de corrosion sous contrainte. La question mérite donc d’être posée : le secteur nucléaire est-il de taille face au défi majeur qui attend la France d’ici 2035 et encore après ?

Si l’on ajoute les 400 TWh nucléaires espérés aux 250 TWh de renouvelables, cela ferait donc une production électrique annuelle de 650 TWh. Pour RTE, « atteindre d’ici 2035 une production électrique bas carbone de 600 TWh minimum, et si possible de 650 TWh voire plus de sorte à couvrir le haut de la fourchette des perspectives de consommation électrique, apparaît ambitieux […] mais faisable ».

Finalement, Xavier Piechaczyk résume le tout. Quatre leviers sont essentiels pour parvenir à mettre en adéquation la hausse future de la consommation et la production électrique. Selon lui, « il faut :

  • de l’efficacité ;
  • de la sobriété ;
  • une production nucléaire la plus disponible possible ;
  • et beaucoup d’énergies renouvelables supplémentaires ».

Pour le président de RTE, « ce qui est nouveau », c’est que la sobriété énergétique « n’est plus une option ». En clair, la France se trouve devant un véritable défi d’envergure pour assurer sa sécurité énergétique. Devant son incapacité chronique à tenir ses objectifs jusque-là, il y a peut-être de quoi s’inquiéter.

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