Investir dans le nucléaire, un mauvais choix pour le climat

Le nucléaire est-il mauvais pour le climat ? Pour de plus en plus de voix écologistes, de scientifiques et d’études récentes, la réponse est clairement oui. Alors que la France se projette vigoureusement dans la relance de l’énergie atomique sur son territoire et en Europe, ces avis contraires mériteraient d’être entendus, voire suivis. En juin 2023, un appel contre le nucléaire était signé par plus de 500 chercheurs et scientifiques français. Fin juillet, c’est un article publié dans une revue de sciences qui affirme que « les investissements dans les nouvelles centrales nucléaires sont mauvais pour le climat ». Pour quelles raisons ? Quels sont les arguments avancés ? Quelles solutions devraient au contraire être priorisées ? Un seul fait est certain : face au dérèglement et au réchauffement climatique toujours plus intenses, la réalisation d’une véritable transition écologique est absolument indispensable.

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Des scientifiques affirment qu’investir dans le nucléaire est mauvais pour le climat

C’est le vendredi 21 juillet 2023 que la revue scientifique Joule a publié un nouvel article. Son titre est plutôt équivoque : « Pourquoi investir dans de nouvelles centrales nucléaires est mauvais pour le climat ».

Son auteur principal est Luke Haywood. Ce dernier est responsable du pôle politique climat et énergie du groupe de réflexion Bureau européen de l’environnement (BEE). L’objet de l’article était d’examiner les raisons des retards et des coûts excessifs des grands projets nucléaires lancés récemment en Europe, tels que :

  • le réacteur d’Olkiluoto 3, en Finlande, mis en service en avril 2023, après treize ans de retard ;
  • le réacteur français de Flamanville 3, dont le raccordement au réseau était initialement prévu en 2012. Toutefois, à ce jour, il n’est toujours pas terminé.

Prenant ce dernier exemple, l’étude indique que « la Cour des comptes française estime que le coût de la centrale nucléaire française de Flamanville passera de 13,2 milliards d’euros à 20 milliards d’euros ». Ce calcul prend en compte « les coûts de financement et les retards ».

Il s’agit donc d’un investissement au montant astronomique. Et c’est justement là le problème d’après Luke Haywood et ses collègues. Pour eux, « les investissements dans les nouvelles centrales nucléaires sont mauvais pour le climat en raison des coûts élevés et des longs délais de construction ».

Cette étude est publiée dans un contexte de plus en plus favorable à l’atome en Europe. De nouveaux réacteurs sont prévus ou envisagés sur tout le continent, à la suite du travail diplomatique du groupe de l’« Alliance du nucléaire ». Des projets devraient donc naître :

  • en France, avec 6 nouveaux EPR de prévus, même si le premier ne sortirait pas de terre avant 2035, soit dans plus de dix ans ;
  • dans plusieurs pays d’Europe de l’est : République tchèque, Hongrie, Pologne, Bulgarie, Slovénie ;
  • en Suède ;
  • au Royaume-Uni.

Cependant, l’avis des auteurs de l’étude est clair. Pour eux, les investissements dans le nouveau nucléaire font obstacle à l’investissement massif dans une meilleure solution pour le climat : les énergies renouvelables. Ils estiment aussi qu’« étant donné l’urgence de l’atténuation du changement climatique, qui nécessite de réduire les émissions du réseau électrique de l’Union européenne à près de zéro dans les années 2030, la préférence devrait être donnée à la technologie la moins coûteuse qui peut être déployée rapidement ». Ce n’est donc pas la direction prise par plusieurs États européens, dont la France, dont on peut se poser la question de l’efficacité de la politique énergétique. En avril 2023, un rapport parlementaire accablant dénonçait déjà une « divagation politique » dans ce domaine dans le pays depuis le milieu des années 1990. Conséquence : la difficulté toujours plus forte d’atteindre la pourtant indispensable transition écologique.

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De nombreux avis et voix opposés au développement de l’énergie nucléaire

Le gouvernement français est-il en train de suivre la même voie que ses prédécesseurs en prenant des décisions contraires au véritable intérêt général ? L’étude publiée dans Joule n’est en tout cas pas la seule à s’élever contre l’ambition présidentielle de développer l’énergie nucléaire. En juillet dernier, l’ONG écologiste Greenpeace avait également affirmé que, face à l’urgence climatique, le nucléaire est une fausse solution, désirant prioriser le recours aux énergies vertes.

Même son de cloche pour Luke Haywood et ses collègues. Selon eux, les énergies renouvelables (EnR) « battent le nucléaire » en matière :

  • de coût ;
  • de rapidité de mise en service.

Puisqu’ils accaparent des investissements qui pourraient permettre de booster d’autres technologies facilement disponibles et les EnR, les investissements dans le nucléaire sont pour eux des « distractions dangereuses ». Les chercheurs jugent que « chaque euro investi dans de nouvelles centrales nucléaires retarde donc la décarbonation par rapport aux investissements dans les énergies renouvelables ».

Au niveau de l’Union européenne (UE), le commissaire Frans Timmermans, responsable du Pacte vert pour l’Europe, s’était aussi montré très clair dès 2020. « Si vous vous engagez dans un nouveau projet nucléaire, soyez conscients des énormes niveaux d’investissements dont vous aurez besoin », avait-il prévenu. « Vous serez coincés avec cela pendant très, très, très longtemps ».

La question du nucléaire divise en réalité fortement les pays de l’UE. Si l’« Alliance du nucléaire », menée par la France, y est favorable, de nombreux autres États y sont opposés. Le groupe des « Amis du renouvelable » s’est d’ailleurs formé en réaction et regroupe des pays tels que l’Autriche, l’Allemagne ou l’Espagne. Le sujet de l’atome a, par exemple, considérablement fragilisé la solidité du couple franco-allemand. En avril 2023, dans une trajectoire opposée à l’Hexagone, l’Allemagne est effectivement sortie officiellement du nucléaire. Cette décision n’empêche pourtant pas Berlin d’importer de l’électricité… d’origine atomique, ce qui lui a valu les critiques de la France sur sa politique énergétique.

Reste que de plus en plus de voix s’élèvent donc bien face à la volonté de faire du nucléaire une véritable solution pour le climat. En juin 2023, le média écologiste Reporterre a publié un appel signé par plus de 500 chercheurs et scientifiques de France. Il regroupe des noms éminents travaillant au CNRS, à l’Inserm ou à l’Inrae par exemple. Des leaders écologistes, comme Noël Mamère, ont également signé cet appel.

Le but de ce dernier est de « refuser tout nouveau programme nucléaire ». Plusieurs arguments ont été mis en avant pour expliquer cette prise de position :

  • le manque de pertinence de ce choix pour limiter le réchauffement climatique, du fait des (trop) longs délais de construction ;
  • les dangers que peut provoquer la production nucléaire. Certains ont déjà affirmé que les sécheresses menacent la sécurité des centrales. En effet, alors que les canicules sont toujours plus nombreuses et intenses, les réacteurs ont besoin de pomper de l’eau pour se refroidir. Comment réaliser cette opération de sécurité vitale si les fleuves et les rivières sont à sec ? Sur le littoral, c’est le risque de submersion qui est craint ;
  • la question du traitement des déchets, qui sont extrêmement polluants.

La conclusion de l’étude scientifique publiée dans Joule est finalement sans appel, se concentrant sur ces délais et ces retards incompatibles avec l’urgence climatique. « Dans un monde décarboné, les retards de constructions nucléaires se traduisent par une hausse des émissions ». Les auteurs préviennent enfin que « sans plans alternatifs, le système électrique actuel à forte intensité de carbone restera en place, rendant les objectifs climatiques irréalisables ».

Le plus frustrant, c’est qu’il serait sans doute illusoire d’imaginer qu’une telle étude puisse faire changer d’avis et les plans des partisans du nucléaire. Ils seraient pourtant bien inspirés de le faire, d’autant que les renouvelables peuvent rapporter des milliards d’euros à l’État.

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