UE : Nucléaire et renouvelable bientôt sur un pied d’égalité ?
Depuis le début de l’année 2023, le fossé n’a cessé de se creuser en Europe entre partisans du nucléaire et des énergies renouvelables. L’« Alliance du nucléaire », groupe de pays pro-atomiques de l’Union européenne, s’est rassemblée le 11 juillet 2023 pour une nouvelle réunion. Son objet : mettre en place une feuille de route invitant la Commission européenne à traiter d’égal à égal les projets de production nucléaire et de renouvelables. Sur quoi les États de cette « Alliance du nucléaire » se basent-ils pour réclamer cette reconnaissance ? Qu’espèrent-ils concrètement s’ils l’obtiennent ? Y a-t-il eu une réaction des « Amis du renouvelable », le camp favorable aux énergies vertes ? Choisir.com vous livre les réponses à ces questions en revenant sur cette réunion où, une fois encore, la France a tenu un rôle central.

Une nouvelle étape dans l’opposition entre pro-nucléaires et pro-renouvelables en Europe
L’« Alliance du nucléaire » est un groupe d’États membres de l’Union européenne (UE) qui s’est formé, en début d’année 2023, à l’initiative de la France. Désirant le développement de la filière atomique en Europe, il ne s’agissait pas, le mardi 11 juillet dernier, de sa première entrevue.
Quatrième réunion de l’« Alliance du nucléaire » cette année
C’est encore une fois notre pays qui s’est trouvé à l’origine de l’organisation de cette nouvelle réunion des pays de l’UE partisans de l’énergie nucléaire. Celle-ci s’est déroulée à Valladolid, en Espagne, à l’occasion du premier Conseil européen informel de l’Énergie sous présidence espagnole du Conseil de l’UE. L’Espagne occupe en effet cette fonction depuis le 1er juillet et la conservera jusqu’à la fin de l’année.
Avant cette rencontre de l’« Alliance du nucléaire » de Valladolid, trois autres entrevues avaient déjà eu lieu cette année :
- la première fin février à Stockholm, alors que la Suède présidait l’UE ;
- la deuxième en mars à Bruxelles ;
- la troisième mi-mai à Paris, pour une réunion formelle.
Cette quatrième assemblée espagnole a rassemblé :
- 12 États différents : la Bulgarie, la Croatie, la République tchèque, la Finlande, la France, la Hongrie, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovénie, la Slovaquie et la Suède ;
- 2 autres pays en tant qu’observateurs : la Belgique et l’Italie. De ce fait, ils n’ont pas participé à la rédaction des conclusions de cette réunion ;
- un représentant de la Commission européenne ainsi que Teresa Ribera, ministre espagnole de l’Énergie. Celle-ci était présente en sa qualité d’hôte et de présidente du Conseil de l’Énergie de Valladolid.
Une opposition entre « Alliance du nucléaire » et « Amis du renouvelable » qui reste vive en Europe
Cette réunion du 11 juillet dernier n’est que la dernière étape d’une opposition qui divise, depuis de longs mois, les pays de l’UE. En réaction à la création, en février 2023, de l’« Alliance du nucléaire », le groupe des « Amis du renouvelable » s’est en effet formé au printemps. Il regroupe par exemple l’Autriche, l’Allemagne ou… l’Espagne, qui assure désormais la présidence de l’UE. En mai, de fortes tensions avaient refroidi les relations entre Paris et Madrid à propos de l’hydrogène rose, d’origine nucléaire. En avril, l’Allemagne est officiellement sortie du nucléaire, alors que la France cherche par tous les moyens à développer ce secteur. La question de l’énergie atomique a donc aussi eu pour effet de fragiliser le couple franco-allemand, pourtant moteur dans la construction européenne.
En juin, de par l’action intensive du gouvernement français, le nucléaire a obtenu d’être intégré dans la dernière directive RED III sur les énergies renouvelables. Ce texte acte le rôle des « autres sources d’énergie non-fossiles » pour atteindre la « neutralité carbone d’ici 2050 », l’objectif de l’UE. Sans être précisément nommée, l’énergie atomique est donc malgré tout quand même présente, au grand dam des « Amis du renouvelable ». Alors qu’elle devait y participer, la France avait d’ailleurs ensuite été exclue de leur dernière réunion, organisée fin juin.
Le 11 juillet, en parallèle de l’entrevue des pays pro-nucléaires, une autre réunion présidée par l’Autriche s’est également tenue. Officiellement, il ne s’agissait pas d’un rassemblement des partisans des énergies vertes. Son objet, d’après les principaux États présents, était davantage la réforme du marché européen de l’électricité, qui est en cours. Le but était de travailler sur une position commune réunissant l’Autriche, l’Allemagne, le Luxembourg et neuf autres pays. Reste que les États cités sont bien membres des « Amis du renouvelable »… Toutefois, d’après le média Euractiv, les Pays-Bas, présents à la réunion pro-nucléaire, ont aussi participé à cette autre séance de travail.
Êtes-vous sûr de ne pas payer votre énergie trop cher ?
faire une simulationUne feuille de route qui cherche à mettre sur un pied d’égalité nucléaire et renouvelable
La réunion de l’« Alliance du nucléaire » du 11 juillet s’est conclue par la rédaction d’une feuille de route, remise à la Commission européenne. Ce texte a un but : encourager Bruxelles « à établir une voie claire pour refléter de manière adéquate le rôle de l’énergie nucléaire dans toutes ses communications et propositions ».
Une demande réalisée au nom de la neutralité technologique
L’objectif de l’« Alliance du nucléaire », synthétisé dans sa feuille de route : mettre en place « une nouvelle stratégie sur l’utilisation de l’énergie nucléaire pour l’UE ». Concrètement, ses membres désirent que l’exécutif européen fasse une égale promotion :
- du secteur nucléaire et des projets en cours ;
- et de ceux relevant des énergies renouvelables (EnR).
Ce que souhaitent également les pro-nucléaires : la « mise en œuvre d’une approche technologiquement neutre ». Pour réclamer cette neutralité technologique, ils se basent sur la taxonomie verte. Il s’agit d’un système de classification des activités économiques réalisé par l’UE afin d’identifier celles étant jugées durables au niveau environnemental. Avec un constat : le nucléaire est inclus (avec certaines conditions) dans cette catégorie d’activités n’aggravant pas le changement climatique, au même titre que les EnR.
C’est pourquoi les partisans de l’atome veulent que cette énergie puisse bénéficier « d’un soutien au même titre que les autres énergies décarbonées » sur la route de la transition énergétique. À noter que d’autres acteurs se posent la question, au contraire, de l’efficacité du nucléaire comme solution pour la transition écologique.
Aux yeux de l’« Alliance du nucléaire », cette neutralité technologique devrait être appliquée :
- au règlement sur l’industrie verte, le Net-Zero Industry Act (NZIA) ;
- à la réforme du marché européen de l’électricité qui est en cours.
Que l’énergie nucléaire soit bien mise sur un pied d’égalité avec les renouvelables ou non, peut-être envisagez-vous justement de passer à l’énergie verte ? Dans ce cas, vous pouvez, à tout moment, changer de fournisseur d’électricité et/ou de gaz. Pour vous aider dans ce but, le Comparateur Énergie de Choisir.com est à votre disposition. N’hésitez pas à utiliser cet outil pratique et rapide qui simplifiera vos démarches !
Autre souhait : la participation de Bruxelles au financement des projets nucléaires
En tout cas, cette demande de soutien et de reconnaissance n’arrive pas là par hasard. Les projets dans le secteur atomique se multiplient en effet dans plusieurs États européens. En France, la loi de relance du nucléaire a été adoptée récemment. La construction de six nouveaux réacteurs nucléaires est d’ores et déjà actée. La Pologne envisage aussi de construire au moins six réacteurs, pour une production électrique nucléaire entre 6 et 9 gigawatts (GW). D’autres projets sont également en cours en Bulgarie, en République tchèque ou encore aux Pays-Bas. Réunis, ils pourraient permettre à l’UE de passer :
- de 100 GW de puissance atomique en 2022 ;
- à 150 GW d’ici 2050, d’après les membres de l’« Alliance du nucléaire ».
Après la réunion, Agnès Pannier-Runacher, ministre française de la Transition énergétique, expliquait l’objectif des partisans de l’atome. Celui-ci est de « contribuer à ce que tous les Français et les Européens puissent bénéficier pleinement de cette source d’énergie décarbonée, compétitive et indispensable pour atteindre nos objectifs climatiques ».
Problème : le financement de ces différents projets, extrêmement coûteux, est souvent un obstacle à leur réalisation concrète. D’après l’« Alliance du nucléaire », il faudrait que l’UE garantisse « des incitations suffisantes pour promouvoir les énergies nucléaires en termes d’objectifs, d’efforts pour faciliter les procédures d’autorisation et de financement » comme pour les énergies vertes. Voilà la demande qui figure dans la déclaration adoptée par le groupe d’États à la suite de la réunion.
Un autre passage est encore plus clair : « Nous encourageons la Commission européenne à développer une politique de financement forte et compétitive pour l’énergie nucléaire ». Le but de l’Alliance : faciliter et normaliser les financements des projets atomiques en cours.
Pour cela, elle propose aussi la mise en place de partenariats entre :
- les États membres ;
- les investisseurs privés ;
- les banques européennes.
Dernière demande des pays pro-nucléaires : que l’exécutif européen améliore son soutien dans la recherche et l’innovation, en particulier au sujet des nouvelles générations de réacteurs. Ce qui est sûr : face à l’importante hausse de la consommation électrique d’ici 2035, il faudra bien trouver des solutions pour produire plus d’électricité.
Êtes-vous sûr de ne pas payer votre énergie trop cher ?
Nos experts énergie vous aident à économiser jusqu’à 200 € sur votre facture gaz et électricité